Société démocratique de contrôle et révolution

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Mince alors, une présentation de roman sur rebellyon.info, un bout de Télérama boboïsant chez les libertaires, l’échec !
En fait c’est un peu plus compliqué que ça ;)
A propos de la zone du dehors d’Alain Damaiso (1999).

Il y a quelques temps, lors d’une rencontre à Lyon où on parlait médias alternatifs, a été discutée la place de la culture -et contre-culture of course- dans nos médias alternatifs, plus politiques que culturels. Rebellyon s’est donc mis entre temps à diffuser plus largement des évènements culturels quand ils touchent à la politique ou à la contre-culture.
Donc, au sortir d’un bouquin pas mal, politique au possible, je me dit que quelques lignes sur rebellyon ont largement leur place

Un roman parce que la lutte, toujours multiforme chez les libertaires -diversité des modes d’actions oblige-, si elle passe souvent par des livres et des écrits (infos, analyses, sociologie, philo, etc) passe aussi par la fiction, le roman, l’anticipation. Outils aussi ludiques que politiques, et qu’il faut diffuser à leur juste -et subjective- valeur, sur rebellyon.info entre autre. Le roman de Damasio justement, outre qu’il soit bien écrit, nous donne des pistes pour réfléchir le sécuritaire en projetant ses personnages dans une société sécuritaire, certes, mais à la justification « démocratique », une anticipation plus crédible que bien d’autres.

La petite présentation de l’intrigue et du livre, obligé :

À Cerclon, colonie modèle installée sur un satellite de Saturne, vivent 7 millions d’exilés d’une Terre
presqu’anéantie par les guerres. Dans cette société utopique qui veut réaliser concrètement l’égalité
des chances et la fluidité de la démocratie d’opinion, on travaille peu, on se distrait beaucoup, un bon tiers
de la population est payé « pour être agréable aux autres », le confort et le niveau technique font mieux
que moderne, les multinationales, se nomment Défordre. La paix sociale est scellée par un classement
généralisé des personnalités, des efforts civiques et des talents, réputé modèle de transparence,
censé assurer l’allocation optimale des rôles sociaux, des emplois, des rémunérations. Les places
de ce classement, les identités mêmes sont remises en jeu tous les deux ans, occasion d’une période
d’instabilité organisée, suivie de grandes fêtes qui cimentent la société. La surveillance est totale,
préventive, discrète. Insidieusement, l’artificialisation du milieu et des modes de vie envahit les corps,
manipule les émotions, neutralise en douceur les énergies.

Comment provoquer le sursaut, réveiller la vitalité de l’être ? Seule une poignée d’opposants ressent
les risques pour l’humain, se ressource dans la dureté et la liberté du Dehors, revendique, essaie de
promouvoir, une vie adulte, autonome et responsable. Ses membres recherchent difficilement les voies
de la résistance. Au moment où s’ouvre le récit, un groupe de militants décide de franchir le pas
de la violence symbolique, ce qui permet à un pouvoir cynique et efficace de les rejeter sans appel dans
l’enfer du terrorisme. La normalisation ne peut manquer de s’imposer, à moins que…

Une narration haletante, des personnages à la fois idéaux-typiques, et présents, vivants, complexes,
et plus encore le monde imaginé par Alain Damasio très fouillé, très cohérent, complètement crédible font
de cette épopée radicalement humaniste et exigeante une parabole des risques de dérives de la démocratie,
dans un écho convaincant à l’actualité. Un livre de plaisir et d’indignation, d’enthousiasme et de fine
pédagogie sur ce qui fait société. (Lire la suite)

Pour ceux qui espéraient une critique littéraire tant pis, le net en regorge, je vous laisse faire votre choix, et pour entrer dans le vif quelques extraits.

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Il y a plein d’autres petits extraits à lire ici, et d’autres infos sur le bouquin.
J’aurais bien voulu trouver un pdf, un lien vers le texte sur le net, un torrent, n’importe quoi histoire de ne pas me taper dans le forum l’inévitable accusation de publicité marchande et pour que tout le monde puisse avoir accès sans le passage par la case porte-monnaie, j’ai pas trouvé, tant pis, mais n’hésitez pas ci-dessous. Bonne lecture pour ceux qui s’y colleront.

Les références :
La Zone du dehors, Cylibris, 1999
La Zone du dehors, nouvelle version, La Volte, 2007 (Folio SF, 2009 pour l’édition de poche) [1]

P.-S.

Vu que c’est un lyonnais, c’est local, non ? Autant pour la charte de rebellyon.info !

Notes

[1si vous pouvez, privilégiez l’édition indépendante !

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  • Le 16 mars 2011 à 15:03, par Caps, pas Caps ? Jok3r

    Je suis assez content de voir que d’autres lecteurs ou lectrices de Rebellyon trouvent aussi de l’inspiration dans la science fiction.

    Je me permets de réagir sur les commentaires, je suis assez d’accord avec Dé-caps notamment par rapport à la naïveté du livre et le final ne m’a guère convaincu même s’il trouve sa place par rapport à ce qui le précède dans le livre. J’ajouterai un bémol à ces remarques qui réduisent trop le livre à certains éléments alors que pas mal de détails ou de passages autres que ceux abordés par Dé-caps mériteraient d’être mis en avant.

    Cependant je ne suis pas d’accord avec Anti-caps, l’auteur n’a certainement pas la prétention de se comparer à Foucault ou Deleuze mais d’intégrer des modes de penser (le -er est voulu) qu’ils ont proposé à la fiction qu’il construit. Je n’ai pas vu à travers ce bouquin une réponse toute faite mais une proposition ou même juste des évocations par-ci, par-là de réponses et ou d’analyses de certaines dynamiques actuelles. Personnellement Anti-caps je te trouve dogmatique et réducteur dans ton interprétation du livre, Foucault et Deleuze ne sont pas là pour nous apporter des réponses et des solutions mais je crois que leurs démarches consistaient plutôt à échanger des modes de penser, créer des décalages, se déplacer, interroger et ni l’un ni l’autre je crois n’aurait voulu être enfermé au travers de leurs écrits. Mais là je parle à leur place, je m’arrête !

  • Le 12 mars 2011 à 21:31, par Dé-caps

    Une certaine maîtrise de la langue, une jolie vision de SF, une ambition marquée dans ce projet et des (car ils sont plusieurs) artistes déterminés à le porter aux nues.

    Mais en fin de compte, un aspect gadget de la technique littéraire, un contexte qui sert de décors sans réellement enrichir (petit bémol pour les clameurs), une certaine naïveté dans le traitement du sujet malgré une vision lucide et nette de la problématique, enfin un auteur qui ne sait plus aujourd’hui si son livre a été écrit à l’époque en prévision d’aujourd’hui où s’il le réédite en profitant d’un contexte qui lui donne raison.

    Passons sur les intentions de l’auteur, et notons que lui et une bande de sympathisant projetaient la réalisation d’un film. Le livre édité chez la Volte en offre un aperçu grâce à un cdrom accompagnant le livre. Sans doute plus difficile à penser qu’à faire, mais plus difficile encore à faire sortir en salle, surtout maintenant que V pour Vendetta a vampirisé le marché.

    Le thème développé, celui de la dérive sécuritaire dans une société consentante, et d’un abrutissement doux vu comme une façon de juguler les réticences avant qu’elles n’apparaissent, reste un peu théorique. Le concept des clameurs, ces bornes audio déposées en milieu urbain et diffusant des messages d’éveil à la conscience révolutionnaire, sont sans doute la meilleure trouvaille, la seule qui justifie pleinement d’avoir fait de ce livre un bouquin de SF. Le personnage le plus stimulant est curieusement ce bureaucrate à la tête du gouvernement qui se compromet avec CAPS, sans se mouiller. Un bel exemple de salopard. Le reste, la victoire arrachée facilement par les joyeux rebelles, obtient notre caution devant le plaisir de lire qu’apporte ce livre. Pas un chef d’oeuvre mais un bon livre.

    Un livre qui tout de même a le mérite de nous tenir éveillés. Les questions posées ne sont pas différentes de celles de Rebellyon. Elles nous amènent parfois à certains questionnements sur nos modes de vie. Questionnements qui ne font que nous amener au bord du gouffre de l’inhumanité qui se tapit au fond de nous. Pour avoir du soda, on préfère tous aller à la supérette que de faire pousser nous même notre coca pour le fabriquer. Même si on sait que le patron de l’enseigne s’enrichit grâce à nous.

    Les réponses apportées par l’auteur ne sont pas les bonnes du reste. Les artistes sont souvent comme çà. Il y a sûrement un jeu caché dans toutes les réflexions philosophiques du personnage principal. Mais je n’en ai pas compris les règles.

  • Le 12 mars 2011 à 16:44, par Pro-Caps

    On en dira ce que l’on voudra quand à l’art et la manière de faire il en reste tout de même un superbe bouquin de SF ne lésinant pas sur la critique du système. L’auteur jongle avec les mots non sans brio, presque un chef-d’oeuvre, à lire en urgence !

  • Le 11 mars 2011 à 18:46, par Anti-Caps

    La qualité du livre se résume au personnage principal, un certain Caps...

    Héros et déjà-chef avant même que la révolution ne soit victorieuse, médiocre épigone de Foucault et Deleuze et piètre tacticien (cf. les attentats minables orchestrés par la Volte), nombrilomane invétéré, notre héros de la révolution reconduit, benêt bienheureux, tous les pouvoirs qu’il est censé défaire... Et les personnages féminins du roman de n’avoir d’autres raisons d’être que de valoriser ce même misérable héros et ses semblables à grosses couilles...

    Ce n’est malheureusement pas grâce à Caps que nous saurons mieux comment mener à bien une révolution désirable.

    Avec Foucault et Deleuse certainement, mais sans leurs thuriféraires, fussent-ils fictionnels.

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