Il existe aujourd’hui, dans un monde dominé par la lâcheté, la résignation
et la servitude volontaire, une ville et une région résolues de résister à
un gouvernement local et mondial qui ne connaît d’autres lois que celles
de la corruption et du profit.
Depuis plusieurs mois, la population d’Oaxaca refuse les diktats d’une
administration corrompue, qui n’hésite pas à tuer les opposants à sa
politique de malversation. Le mouvement n’a cessé de se développer et a
donné naissance à une assemblée populaire, encore noyautée par la vieille
politique clientéliste, mais qui s’oriente de plus en plus vers un refus
de tout pouvoir et vers une priorité : améliorer la vie quotidienne des
enfants, des femmes et des hommes.
J’appelle à se manifester en faveur d’Oaxaca celles et ceux qui n’ont
d’autre force que leur volonté de vivre, car c’est de là que vient
aujourd’hui la seule pensée qui ne soit pas à la botte des commanditaires
du marché planétaire.
Je les appelle à défendre par tous les moyens de leur inventivité la libre
Commune d’Oaxaca afin qu’en son assemblée populaire se développent la
démocratie directe et la pratique autogestionnaire que les barricadiers,
la population urbaine et les communautés paysannes indigènes sont en train
de consolider.
Je les appelle à alerter toutes les forces vives, qui peu à peu
s’éveillent pour sortir des millions d’êtres humains du cauchemar que fait
peser sur eux le totalitarisme économique. Il faut empêcher que le
gouverneur Ulises Ruiz et ses tueurs, soutenus par Fecal (Felipe
Calderon), le nouveau président du Mexique, n’écrasent l’expérience
d’autonomie régionale - urbaine et paysanne - qui s’esquisse dans la
lignée de la Commune de Paris et des collectivités andalouses, aragonaises
et catalanes des années 1936-1938.
Ce qui se passe à Oaxaca est un espoir pour tous ceux qui désespèrent
d’accéder à une existence, digne de ce nom, sous le joug du capitalisme
financier réduisant la vie et l’environnement à une marchandise.
Souvenons-nous ! C’est une prise de conscience mondiale qui a aidé le
mouvement zapatiste encore fragile à échapper à la répression du
gouvernement et de son armée, en janvier 1994 et en février 1995.
Ce que les zapatistes ont réussi pour les communautés paysannes indigènes
du Chiapas, la population d’Oaxaca est en train de le tenter en milieu
urbain. L’enjeu est considérable. Faisons en sorte que se conforte la
chance d’instaurer la Commune d’Oaxaca, car cette chance est la nôtre,
celle de l’émancipation existentielle et sociale qui nous tient à cœur.
En toute autonomie individuelle,
Raoul Vaneigem.
Le 28 novembre 2006.
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