Loi « sécurité globale » : surveillance des manifestant·es, impunité des flics, sous-traitance de la police

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Loi sécurité globale

Le gouvernement, meilleur syndicat de flics de France, ne fait pas de pause pendant le confinement.

Prime spéciale pour tabasser les Gilets Jaunes en 2019 [1], augmentation de salaires générale en 2020 [2], extension des possibilités d’engagement des tirs pour la police avec la loi de 2017 sur la sécurité nationale avec la possibilité pour la police de tirer sur des gens en fuite. Le gouvernement est devenu le meilleur syndicat de flics de France, et il se radicalise : En plein confinement, il veut faire voter la loi « sécurité globale » proposée par le député Jean-Michel Fauvergue, ancien patron du RAID.

1 – Sécurité globale, répression totale : Surveillance généralisée des manifestant·es

Face aux manifestations, le gouvernement a adopté la dissuasion par la peur. Nasses géantes [3], utilisation massive de gaz lacrymogènes, fouilles au corps, vol de matériel de protection ou de soin, injures, LBD, grenades, tabassages deviennent monnaie courante [4].

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La loi accompagne systématiquement l’aggravation des violences policières, organise leur impunité et criminalise en parallèle les manifestant·e·s : création du délit de dissimulation du visage en 2019 et introduction de la peine d’interdiction de manifester.

Rappels à la loi sur des procédures vides, système de gardes-à-vue abusives, condamnations dans des procès express, multiplication des contraventions et des amendes : l’institution judiciaire vise dans les faits à dissuader les manifestant·e·s de retourner dans la rue.

La proposition de loi "sécurité globale", c’est d’abord une surveillance généralisée :

- Usage des caméras-piétons des forces de l’ordre : dorénavant, les images seront transmises en direct au poste de commandement de la police, et le policier à l’origine de la captation aura accès aux images. En conséquence, la reconnaissance faciale pourra être utilisée en temps réel en comparant les images captées à celles enregistrées dans le TAJ (le fichier de police qui recense tous les auteurs, victimes, témoins d’infractions, avec leurs photos bien sûr).

Ainsi les flics pourront immédiatement savoir qui est interdit·e de manifestation, qui a déjà été arrêté·e et constitue donc un potentiel « bon client » à remettre entre les mains de la justice, ou identifier tel ou tel reporter engagé·e contre les violences policières (cf. l’acharnement policier contre Gaspard Glanz ou Taha Bouhafs), et plus globalement contrôler préventivement les militants déjà identifiés par la police.

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- Légalisation de l’usage généralisé des images prises par les drones : L’autorisation de l’utilisation des drones couvrira la prévention, la recherche, la constatation et la poursuite des infractions pénales, en prenant soin de ne pas distinguer entre crimes, délits et contraventions : on pourra donc faire voler des drones au-dessus de toute une ville au prétexte de rechercher les voitures qui grillent un feu rouge. Bien sûr, cette loi vise explicitement les manifestations, et l’identification nominative de ses participant·es.

Pour rappel, le Conseil d’État, suite à un recours de La Quadrature du Net, avait jugé en mai 2020 que la vidéosurveillance par drone mise en place par la Préfecture de Police de Paris était illégale. Pourtant l’utilisation des drones continue malgré son interdiction, et la Quadrature du Net vient de déposer un référé au tribunal administratif de Paris pour faire cesser cette pratique.

Il est donc urgent pour les flics d’avoir une loi pour légaliser l’usage de drones, et ce alors même que personne n’est capable de dire combien il y a de caméras de vidéosurveillance en France [5].

La police pourra filmer systématiquement les manifestations, pour un coût bien moindre comparé aux hélicoptères de la gendarmerie. Et l’on sait déjà que ce seront les seules images perçues comme légitimes à être projetées dans un tribunal, puisqu’en parallèle celles témoignant de violences policières seront délégitimées et censurées.

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2 – Sécurité globale, répression totale : Impunité organisée des forces de l’ordre

L’impunité totale des forces de l’ordre a été mise à mal ces dernières années par la diffusion d’images de violences policières sur internet. Face à cet affront, le gouvernement prend des mesures radicales : interdiction de diffuser l’image des flics et des gendarmes et limitation de leur utilisation comme preuve devant les tribunaux. De plus, pourquoi se limiter aux flics ? La loi organise l’impunité des militaires qui utiliseront leurs fusils d’assaut.

Si les violences policières commencent à sortir au grand jour, il est urgent pour le gouvernement d’étouffer quiconque voudra les dénoncer. La loi prévoit que le fait de diffuser l’image de policier ou de gendarme en fonctions sera puni d’un an de prison et de 45’000 euros d’amende. C’est l’impunité totale des policiers qui est organisée : les rares affaires de violences policières qui arrivent jusqu’à la condamnation de policiers ont fait l’objet de diffusion d’images dans les médias. De fait, on constate que lorsque les images ne sont pas diffusées, la justice (et particulièrement le parquet) s’empresse d’enterrer les affaires. Ce n’est que sous la pression médiatique que, parfois, un procureur décide de saisir un juge quand quelqu’un s’est fait tabasser par la police.

Au passage, la loi ne vise pas seulement le visage, mais aussi « tout autre élément d’identification » : Comme ça, si un flic oublie de retirer son numéro de matricule, on ne pourrait même pas le montrer en train de tabasser un·e manifestant·e.

Plus grave encore, il sera très difficile d’utiliser l’image de violences policières comme preuve devant la justice :la loi prévoit en effet que cette infraction “ne [fait] pas obstacle à la communication, aux autorités administratives et judiciaires compétentes, dans le cadre des procédures qu’elles diligentent, d’images et éléments d’identification d’un fonctionnaire de la police nationale ou d’un militaire de la gendarmerie nationale.” En conséquence, on ne pourra pas envoyer des images de violences policières directement au procureur… il faudra attendre qu’une enquête soit ouverte avant de communiquer les images de violences policières à la justice. Autant dire que les ouvertures d’enquêtes sont tellement rares qu’on ne pourra même plus apporter à la justice les preuves des violences policières.

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L’autorisation laissée aux flics de porter leur arme en-dehors de leur service est expérimentée en 2015 – mais comme toujours dans ce domaine, il ne s’agit jamais d’expérimenter, seulement de durcir définitivement la répression. Avec la nouvelle loi, on ne pourra pas refuser l’entrée d’un établissement recevant du public à un flic armé lorsqu’il sera hors service. Comme ça, personne ne pourra interdire à un flic armé de venir se bourrer la gueule dans un bar. Pourtant, depuis 2015, le port d’armes par les flics hors services leur a surtout servi à assassiner leurs conjointes [6].

Enfin, autant utiliser l’armée, maintenant qu’on s’est habitué à voir des militaires avec des armes de guerre patrouiller en ville toute l’année. Pour ça c’est simple : on prend la loi du 28 février 2017 ultra-permissive qui permet aux flics de tirer à vue sur presque n’importe qui (par exemple contre quiconque s’enfuira et sera susceptible de blesser quelqu’un dans sa fuite), et on l’applique aux militaires. Théoriquement un militaire pourra donc abattre comme un lapin avec son fusil d’assaut un·e cycliste qui s’enfuit rapidement à vélo en risquant de renverser un piéton.

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3 – Sécurité globale, répression totale : Sous-traitance de la police judiciaire

La police judiciaire, c’est la constatation des infractions et la recherche de leurs auteurs. En temps normal, c’est la police nationale et la gendarmerie qui font cela. Elles obéissent aux ordres des procureurs (donc du ministre de l’intérieur) ou des juges d’instruction (quand il y a une instruction, comme en ce moment à Grenoble.

Avec cette loi, la police municipale pourra exercer une partie de cette activité.

Or la police municipale obéit aux maires : Si une mairie mène une politique fasciste (en admettant que l’actuel ministre de l’intérieur ne mène pas une politique fasciste), le maire pourra envoyer la police municipale harceler certains quartiers.

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Cette mesure s’inscrit dans un contexte d’explosion des effectifs, des budgets et de l’armement de la police municipale, qui devient un sous-traitant de la police nationale (voir déjà cette enquête sur IAATA en 2016).

Côté effectifs, il y avait 5’600 policiers municipaux en 1984, 14’300 en 2002… aujourd’hui, ils sont presque 24’000. Autre constat, la police municipale est déjà sur-développée dans les régions où l’extrême-droite est forte : sur la côte méditerranéenne, il y a 9 % de la population… mais 26 % des policiers municipaux. Dans le top 10 de la concentration de policiers municipaux, on trouve Cannes, Perpignan, Nice, Nîmes… La région Rhône-Alpes est aussi bien représentée, avec Saint-Étienne et Lyon.
En plus de l’explosion des effectifs, on assiste à une explosion de l’armement : LBD, taser, lacrymos… aujourd’hui, plus d’un policier municipal sur deux porte une arme à feu. Pour ajouter à la surenchère, Marseille demande maintenant des fusils [7]. Dans un village de « droite dure », un maire prend la pose avec son flic municipal mitraillette au poing [8].

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On constate tous les jours, dans la rue, que la police municipale devient une force répressive à part entière : intrusion dans une école occupée par des parents d’élèves en mai et agression d’un facteur en juin 2018 à Lyon, violences racistes à Grenoble la semaine dernière, saccage de jardins occupés à Dijon, violences multiples à Toulouse, un homme tué à Béziers.

La Cour des comptes constate elle aussi le passage d’une logique de prévention à une logique d’intervention et de répression au niveau national [9]. À Lyon, le Groupement opérationnel mobile (GOM, merci Collomb) fait le travail de la BAC, par exemple en fracassant un crâne pendant la fête des lumières de 2010.
Avec cette loi « sécurité globale », la police municipale devient un sous-traitant à part entière de la police nationale, en acquérant le pouvoir de constater de nombreux délits. Bientôt les maires réacs de toute la France pourront se prendre pour des commissaires en puissance en envoyant leurs nervis harceler les plus précaires.

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La loi ne s’arrête pas à la police municipale. Les vigiles privés gagneront un uniforme commun, pour qu’ils puissent se sentir aussi tout-puissants que leurs homologues nationaux et municipaux. De plus, les retraités de la police nationale en manque de sensations fortes pourront devenir vigiles facilement. Cela facilitera le « transfert de compétences » en matière de clé d’étranglement et d’organisation de l’impunité.
Les vigiles ont déjà un peu d’avance dans ce domaine, en tuant Mickaël Blaise pour le compte de Carrefour à La Part-Dieu en 2009, et en tirant sur un jeune à Genève en 2006 et en soutenant les riches propriétaires contre des squatteurs à Lyon le mois dernier.

La loi « sécurité globale » est une étape supplémentaire vers la création de mercenaires de l’ordre.

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