Rappel des faits concernant le décès de Mehdi
Mehdi est décédé dans la nuit du 10 au 11 décembre 2016, alors qu’il rentrait chez lui, en scooter avec deux amis, après avoir fêté la naissance de sa fille. Une voiture de police les a pris en chasse, les collant tellement que l’avant du véhicule a touché à plusieurs reprises la plaque du scooter. À l’angle des rues Salengro et Pressensé, c’est l’accident mortel pour Mehdi. Ses deux amis finissent à l’hôpital. Ont-ils été parchoqués par la police ? Mehdi a-t-il perdu le contrôle du scooter sous la pression policière ? C’est ce que voudraient savoir les proches de Mehdi.
Dès l’annonce de la nouvelle à la famille, les policiers ne sont pas sereins et présentent plusieurs versions successives, la première allant jusqu’à dire que leurs collègues ne poursuivaient pas le scooter et qu’il s’agit d’un banal accident de la route ne nécessitant pas d’enquête particulière. Les différents commissariats refusent de prendre les plaintes des membres de la famille pour qu’une enquête soit ouverte (ce qui, en théorie, est illégal). Après plusieurs refus, la gendarmerie de Givors accepte avec comme consigne du procureur de… ne pas enquêter. L’« enquête » se finit donc par un non-lieu (en mai 2017). Depuis ce moment plus de nouvelles. La décision du non-lieu n’étant toujours pas notifiée, la famille ne peut pas se porter partie civile et avoir accès au dossier. Cela empêche aussi de demander la nomination d’un juge d’instruction pour obtenir une véritable enquête : analyse du scooter, de la voiture de police, du rapport d’autopsie, interrogatoire des différents témoins, bref tout ce qui n’a pas été fait dans la première « enquête » bâclée (les policiers n’ont pas hésité à dire à la famille endeuillée que l’expertise du scooter était trop chère…).
Retour sur la Marche Blanche du 29 Janvier 2017
Rapidement s’est créé un collectif Vérité et Justice, regroupant la famille et différents soutiens, qui décide d’organiser une manifestation le 28 janvier 2017. Du lieu de « l’accident » jusqu’au commissariat Marius-Berliet, 150 personnes ont défilé pour exprimer leur colère et demander l’ouverture d’une enquête. Les policiers, dont beaucoup en tenue de maintien de l’ordre, étaient presque aussi nombreux que les manifestants.
Un peu après la dispersion de la manifestation (qui n’a pas pu aller à son terme, les forces de l’ordre l’ayant bloqué avant la fin du parcours), plusieurs équipages de la BAC sont venus mettre un coup de pression aux derniers manifestants, en l’occurrence les membres de la famille de Mehdi. Ces derniers ont eu droit à un contrôle d’identité collectif sans justification. La BAC a menacé de les embarquer avant de les laisser partir.
Quelques jours plus tard, deux proches de Mehdi (une cousine et sa belle-soeur) sont convoquées au commissariat pour une audition. Finalement seule L. est poursuivie pour « outrage à la police nationale » lors de la manifestation. Pas d’insultes, mais plusieurs slogans sont incriminés : « Tout le monde déteste la police », « La police assassine, la justice acquitte » et « Justice pour Adama, justice pour Mehdi ».
Pour avoir scandé ces simples vérités et exigé justice, avec l’ensemble des autres manifestants, la belle-sœur de Mehdi est aujourd’hui poursuivie par le parquet du tribunal de Lyon.
Appel à soutien suite à la répression
Avec l’état d’urgence, on a eu droit aux perquisitions administratives arbitraires sur simple dénonciation « citoyenne », aux préfets qui interdisent des manifestations quand bon leur semble puis à des policiers venant remettre en main propre des interdictions de manifester à des opposants trop virulents.
Désormais, depuis la normalisation de l’état d’urgence dans la loi, la répression se fait de plus en plus forte notamment envers tous celles et ceux qui osent critiquer la police et son impunité. Ainsi, en novembre à Clermont-Ferrand c’est un rassemblement en mémoire de Wissam El Yamni (asssassiné par la police en 2012) déposé par le maire en personne qui est interdit par la préfecture ! Le 20 janvier, à Vienne c’est une marche blanche pacifique en mémoire de Joaïl (décédé il y a deux mois alors qu’il fuyait un contrôle de police) qui est interdite. À Beaumont-sur-Oise, des frères d’Adama Traoré (tué par des gendarmes en 2016) sont incarcérés suite à une manifestation… La liste est longue, tout comme le nombre de victimes de la police cette année qui se monte à 34 décès selon le recensement de BastaMag.
Ce 26 Janvier, le parquet de Lyon franchit un nouveau pas en s’apprêtant à traîner devant la justice une manifestante, membre d’une famille de victime de la police, pour de simples slogans prononcés par 150 personnes lors d’une marche blanche. Nul besoin d’être voyant pour lire aux travers de toutes ces manœuvres que c’est la possibilité même de s’opposer à une situation intolérable, une loi ou une institution qui est directement attaquée et remise en cause.
Nous entrons dans un monde où toutes critiques envers l’État et ses institutions sont réprimées sévèrement. Ce monde, nous n’en voulons pas !
« Tout le monde déteste la police », « La police assassine, la justice acquitte », « Justice pour Adama, justice pour Mehdi » : il n’y a rien à regretter dans ce qui a été dit collectivement ce jour-là. Ce que L. a clamé comme 150 autres personnes pendant cette marche relève simplement d’un constat que tout le monde peut faire en lisant la presse quotidienne.
Ne la laissons pas L. seule face à ses juges,
C’est notre liberté de critiquer à tous et à toutes qui est remise en cause !
Comité Vérité et Justice pour Mehdi
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