« Sache que ta meilleur amie, prolétairE c’est l’alchimie ... »
En mai 2004, le CDL sortait un nouveau numéro de ses « mélanges d’histoires libertaires » : une mixture d’événements et d’expériences sans véritable chronologie, distribués comme par hasard... Il y a « le procès des 66 anarchistes de Lyon vu par la presse locale » (en 1883), et des choses sur « l’engagement » ou « les stratégies des anarchistes aujourd’hui ». On trouve des trucs sur Brassens et sur Radio Canut, des histoires retraçant des « aventures-squat » à Lyon (de la Duende au Gourbi) ou à Dijon (« l’organisation des concerts dans l’espace autogéré des Tanneries »). A aucun moment la dimension libertaire de tel ou tel fragment ne se trouve expliquée ou prédéfinie ; en fait on dirait bien que c’est l’éclatement ou la dispersion même de ces histoires qui atteste d’une dynamique commune, relayée d’expériences en expériences. Ces aventures multiples répondent à la diversité du réel, un réel à éprouver et à investir chaque fois de manière autonome et sous une perspective d’émancipation...
Alors c’est sûr, vu comme ça, ça fait un peu théorique. Mais ce « mélange d’histoires libertaires » s’attaque d’abord à toute une série de questions très concrètes : pourquoi le popouri a dû suspendre sa parution entre 1893 et 2003 ; pourquoi les anarchistes sont schizophrènes (et ont raison de l’être) ; comment finit la « chanson à tendance géométrique » de Georges Brassens ; pourquoi ouvrir un squat reste bien plus rigolo et constructif que se faire jeter en prison (même si l’un n’empêche pas l’autre) ; en quoi la musique est plus belle quand elle est autogérée ; sous quelles conditions Radio Canut ne sera jamais vaincue... Et puis dans la première histoire (« la première Internationale et le mouvement anarchiste à Lyon ») on apprend que, dès le départ, le « mouvement libertaire » est apparu en état de « reconstruction ». Il n’y a donc pas d’âge d’or mais d’emblée des expériences à (re) bricoler et à faire tenir localement... alors on trouve des plans assez terrifiants, genre « mettre en place une organisation de masse avec ses cellules, ses délégués, ses impôts révolutionnaires et ses tribunaux populaires ».
L’organisation anarchiste, là, ressemble en gros à un État en petit, et l’essentiel de l’activité consiste à s’exclure les unEs les autres par procès politiques interposés. Mais dès 1872 apparaissent également « une multiplicité de petits groupes » entrant en rapport sur la base d’une « autonomie complète ». En 1873 un de ces groupes affinitaires énonce sa règle d’action en affirmant : « Lyon est déclarée commune libre et autonome, la dissolution de la police est instituée ». Et comme pour répondre, à la suite, il y aurait tout ce mélange d’histoires, toutes ces manières d’envahir et de transformer la ville, en passant par les toits ou par les ondes... Ca laisse songeur/euses.
Akua Sarime
Compléments d'info à l'article