Récit de la manifestive du 30 avril

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Suite au recoupement de nombreux témoignages, récit par le Collectif de soutien du 30 avril : six personnes ont été inculpées et quatre ont été emprisonnées suite à la répression sans précédent d’une manifestation sur Lyon.

La manifestive du 30 avril 2005 à Lyon a été mise en place par
le Collectif des Résistances qui regroupe des personnes de divers
horizons sans appartenance partisane. La manifestive, s’inscrivant dans
le Festival des Résistances et des Alternatives, a été un moment de
musique, de danse, de fête et de revendications fortes et pacifiques,
pour une planète sans frontières.

Alors que la queue du cortège festif se trouvait place des
Terreaux à hauteur de l’entrée du musée des Beaux Arts, 3 policiers de
la BAC, qui n’étaient signalés par aucun brassard
, se trouvaient en
début de cortège et ont essayé à plusieurs reprises d’arrêter des
personnes tout en remontant vers la fin de la manifestation festive. Au
moment où ils atteignent la queue du cortège, ils tiennent un
manifestant immobilisé ; 3 autres policiers en civil qui étaient cachés
derrière une voiture ont surgi sur une personne au sein de la
manifestive.

Comme il était impossible de les reconnaître, sans brassards,
sans signes distinctifs, la réaction immédiate des personnes
environnantes a été de protéger ces personnes, pensant avoir à faire à
des provocateurs. Croyant que c’était une simple bagarre sous cette
chaude après-midi, plusieurs participant-e-s à cette manifestive, sont
venus logiquement s’interposer de façon responsable.

Le premier groupe de policiers en civils qui tentaient d’arrêter
des manifestant-e-s a laché prise pour rejoindre leurs voitures. A ce
moment-là, sans aucune sommation, des bombes lacrymogènes ont été
lancées par des policiers placés près de l’entrée de la place des
Terreaux. Certaines ont atterri au milieu de la place, les gaz
atteignant même les terrasses des cafés derrière la fontaine Bartholdi.

Pendant cet évènement explosif, l’autre groupe de civils était
aussi repoussé par des manifestants qui ne comprenaient pas ces
violences. Entre autres, Virginie et Antoine, qui n’étaient ni déguisés, ni masqués. Ils étaient là comme beaucoup pour faire la fête. Ils ont vu des gens qu’ils ont pris pour des manifestants se bagarrer et ne sachant pas que c’étaient des policiers en civil ils se sont approchés dans l’intention de calmer la bagarre. C’est en arrivant à quelques mètres qu’ils ont vu leurs matraques et leurs flash-ball. Comprenant qu’il avait un flash-ball pointé sur lui, Antoine a écarté un bras en reculant pour repousser la foule, il tenait Virginie à coté de lui par le bras.

Une bombe lacrymogène a explosé à leurs pieds. Dans la bousculade qui a
suivi, Virginie a été attrapée par les policiers. Alors que la foule
était repoussée par les gaz lacrymogènes, ils l’ont alors trainée par
les cheveux sur une trentaine de mètres
jusqu’à leur voiture qui était
garée devant la sortie de Lyon Parc Auto, à l’abri des regards des
manifestants repoussés, mais en pleine visibilité des passants sur la
place des Terreaux. Elle avait les genoux en sang. Là, ils l’ont plaquée
au sol, lui maintenant le visage contre la chaussée, les mains dans le
dos, ils l’ont matraquée, et l’ont cognée à coups de pieds. Puis, ils
l’ont coincée sous une voiture, une roue dans l’entrejambe et l’ont
menottée. Et, ensuite, ils l’ont électrocutée avec un taser, c’est-à-dire une décharge de 50 000 volts, avant de l’emmener au
commissariat central Marius Berliet.

A ce moment-là, un quatrième policier de la BAC, qui lui portait un
brassard fluo, se trouvait à quelques mètres tourné vers le public
présent sur la place.

Il faut préciser que ce samedi après-midi se trouvaient sur la place des Terreaux de nombreuses personnes ne faisant pas partie de
la manifestation, aussi bien sur la place qu’aux terrasses des cafés... Le sérum physiologique a été beaucoup apprécié, car de nombreuses personnes, y compris de jeunes enfants et des personnes plus âgées, ont été incommodées par les gaz lacrymogènes.

C’est à s’interroger sur la nécessité et les desseins d’une
intervention policière, des proportions qu’elle a prise, et des dangers qu’elle a fait encourir, alors que cette manifestation festive se déroulait dans la bonne humeur.

Lorsque la foule du cortège a quitté la place pour s’engouffrer
dans la rue Constantine, les passants choqués huaient les forces de
l’ordre depuis la place des Terreaux, et les personnes présentes aux
terrasses des cafés en faisaient de même. Quelques cannettes, lancées en direction des policiers, ont atterries au sol.

Le cortège, toujours festif, beaucoup n’ayant même pas vu
ce qui s’était passé en fin de cortège, suivi de très loin par les
forces de l’ordre, continue la balade prévue pour arriver Place St Paul où se déroule la dernière partie de la manifestive pendant une heure. La place est très surveillée par des policiers en uniformes mais tout se passe bien jusqu’à la fin. A 19 h comme prévu, les organisateurs demandent au public de se disperser et aux chars sonores de quitter les lieux. A 19 h 30 les camions sonores avaient éteint leurs enceintes. Le public ayant dansé toute l’après-midi met du temps à se disperser. A 20 h, il ne
reste qu’une trentaine de badauds sur la place, et les chariots, servant à récupérer les bouteilles vides, tout au long de la manifestive, pour éviter qu’elles ne demeurent sur la chaussée, dans un souci d’hygiène publique. Les organisateurs s’apprêtaient à aller vider ces chariots lorsqu’une dispute éclate entre plusieurs personnes.

L’intervention des CRS est immédiate, sans aucune sommation :
ils sont environ une quinzaine à charger, portent des matraques, des
boucliers et des casques. Ils poussent les derniers présents vers les
petites rues qui vont vers St Jean. Quelques manifestants sont encore
sur la place : une deuxième charge est lancée à leurs trousses. Quelques
cannettes sont jetées en direction des forces de l’ordre. C’est la cohue
entre les manifestants, certains tentent de rappeler à la dispersion et
au calme, d’autres sont effarés par les CRS et les jets de bouteilles.
En reculant devant une charge de CRS, sur la place, un des jeunes hommes
poursuivis renverse une poubelle remplie de bouteilles vides. Des personnes qui se trouvaient là, qu’ils soient manifestants, habitants ou
commerçants du quartier, sont frappés à coup de matraques.
Sur la place
St Paul, une seule personne aurait été interpellée.

Ce n’est qu’un peu plus tard que les CRS ont quadrillé tout le
quartier par petits groupes de trois/quatre et ont arrêté quatre autres
personnes qui rentraient tranquillement. Un jeune homme habitant le
quartier, qui venait de descendre de chez lui, s’est trouvé nez à nez
avec une escouade de CRS et leur a demandé ce qu’il se passait : il s’est
fait interpellé alors qu’il n’avait pas participé à la manifestation et
fait aujourd’hui partie des inculpés.

Un groupe est allé au commissariat central Marius Berliet
prendre des nouvelles de la jeune fille et des autres personnes arrêtées
et mises en garde à vue. Un autre groupe était resté sur place pour
inciter les participant-e-s à la manifestive à partir, lorsque la fête était finie (d’ailleurs ça été suivi d’effet pour de nombreuses
personnes), et aussi pour nettoyer la place St Paul, vider les
bouteilles dans des silos à verre et laisser place nette, mais ces
personnes en ont été empêchées par les CRS qui bloquaient les accès à la place. En faisait partie une des personnes qui ont été arrêtées et
inculpées.

On peut s’interroger à nouveau, face à une simple altercation
interne, sur cette intervention policière inappropriée et de grande
envergure, mettant en danger les passants, et empêchant les
organisateurs de nettoyer la place.

Les six personnes qui ont été arrêtées lors de la manifestive du
samedi 30 avril sont passées en comparution immédiate lundi 2 mai, en
fin de journée, séparemment les unes après les autres. Il était près de
21 h lors du délibéré. Tous ont demandé à ce que le procès soit repoussé
afin de préparer leur défense. Pour certains ce sera le 25 mai, pour
d’autres le 26 mai.

Ce qui est reproché à Virginie, qui ne devait pas comprendre ce
qui lui arrivait si brutalement :
- elle est accusée de « rébellion »,
- « appel à l’émeute » (elle a crié quand elle a reçu des coups de pieds
dans la figure...),
- accusée "d’avoir tenté de dérober l’arme d’un
policier" (peut-être qu’elle a touché la matraque qui la frappait...),
- « violences volontaires sur agent des forces de l’ordre »...

En ce qui
concerne les autres inculpés, ils sont accusés notamment de "violences
volontaires avec arme par destination (jet de cannette) sur personnes
dépositaires de l’autorité publique"...

Sur les 6 personnes qui ont été arrêtées ce jour là, 4 ont été
emprisonnées. Deux autres ont été relâchées et placées sous contrôle
judiciaire astreignant sans pouvoir quitter leur quartier respectif.

On peut s’interroger pourquoi des personnes ont été mises en prison arbitrairement, alors qu’habituellement, en pareil cas, les personnes
interpellées sont relâchées à la fin de la garde à vue.

Si des abus graves ont été commis, des ordres ont été donnés.
Ne laissons pas s’installer un état répressif.
Des personnes se retrouvent injustement en prison.
Soutenons-les.
Un collectif de soutien des inculpés du 30 avril
a été mis en place. Merci d’indiquer si vous avez été témoins ce
jour-là, si vous avez des photos ou simplement pour soutenir :
mail : collectifdesoutien30avril chez no-log.org

Collectif de Soutien du 30 Avril

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