Mardi 10 décembre, après une première tentative spontanée le jeudi 5 décembre, le blocage de l’Ecole Normale Supérieure de Lyon s’est organisé, dès 6h30, pour imposer le rapport de force à l’administration, et obtenir la fermeture administrative de l’établissement, peu familier de la chose.
Les dix accès du site Descartes ont été bloqués et les murs ont accueilli les fragments de pensées qui animent cet acte : « Le salaire étudiant pour tous.tes », « Envie de Niquer le Système », « Pour la révolte, par la révolte », etc.
Dire que c’est un blocage important, ce n’est pas pour dire qu’à l’ENS on se pense hors-normes. C’est signaler qu’un tel dispositif, qui a tenu 6h pour obtenir gain de cause, n’avait pas eu lieu depuis 2009, et n’avait jamais mené à une fermeture administrative.
C’est dire si la culture révolutionnaire de l’Ecole est à construire. Le blocage d’hier a créé un précédent, une brèche dans laquelle il va falloir s’engouffrer pour faire de l’ENS un acteur des révoltes étudiantes et solidaires de Lyon. On y croit tous, désormais.
Mais la matinée n’a pas été de tout repos, il nous a fallu bloquer de 6h30 à 11h48, précisément, à près de 100 personnes. Bloquer les portes et portails, mais aussi les fenêtres (puisque des membres du personnel sont rentrés par celles-ci dans leur ferveur à aller travailler… et pour nous décrédibiliser). Bloquer aussi les accès pompiers et secours, afin de mettre la présidence dans l’illégalité dès le début des cours à 9h, puisque la sécurité des personnes n’était ainsi plus assurée. Mais celle-ci n’a pas facilement cédé, certainement au fait de ce que cela représenterait en termes de symbole.
Le message envoyé est le suivant : à l’ENS on est solidaires. Tous les étudiant.es n’y sont pas salariés, les profils sociaux y sont variés, la précarité nous touche aussi, à travers les étudiant.es et les personnels.
Surtout : être une Ecole d’Etat, formant de futur.es fonctionnaires ne signifie pas que nous en sommes les petits soldats. Nos avenirs de fonctionnaires (que l’on se destine à être profs, chercheurs, agent.es d’une collectivité, d’un ministère) sont précaires, la réforme des retraites nous affectera également, et ce qui est aujourd’hui un « privilège » (salaire pour certain.es, bonnes conditions d’étude, etc) devrait être la norme pour tous.tes les étudiant.es et même pour tous.tes les travailleur.ses du secteur public et privé.
C’est pourquoi l’obtention de la fermeture administrative est si importante : elle permet de déclarer les personnels en chômage technique, et non en grève. Elle permet donc à tous de se mobiliser sans perdre son salaire journalier. Chose que de nombreuses personnes avec qui nous avons discuté (et qui tentaient de forcer le blocage) ignoraient totalement. Il n’y a pas de petites victoires : à l’ENS, on revient de loin en termes de mobilisations politiques ! Désormais, il nous faudra aussi du soutien.
En tenant le barrage, on se fait copieusement insultés par un cycliste : « Vous êtes payés par l’Etat, vous êtes une honte ! ». La honte, c’est la politique de l’Etat, pas que ces agent.es et étudiant.es se révoltent. La honte, c’est de refuser d’être solidaire. La honte, c’est de ne pas engager le combat, « normale sup » ou pas.
Textes et photos : C. O
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