À l’initiative du Rassemblement pour la protection des peuples et des ressources afro-caribéennes (RPPRAC), des centaines de personnes ont manifesté et ont organisé des blocages de grandes surfaces pour exiger un alignement des prix sur ceux de la métropole, car les produits alimentaires sont en moyenne 40 % plus chers aux Antilles que dans l’Hexagone.
Quinze ans après le soulèvement populaire en Guadeloupe, Martinique et Guyane contre la « pwofitasyon » – c’est-à-dire l’”exploitation outrancière” par les capitalistes qui contrôlent les moyens de distribution – le problème reste entier aux Antilles.
Une misère structurelle
Alors que le taux de pauvreté en Martinique est plus de deux fois plus élevé qu’en métropole, les quelques grandes familles contrôlant la majorité des commerces (les « békés ») imposent des prix exorbitants sur l’ensemble des Antilles françaises. Cette situation d’injustice est d’autant plus frappante avec l’inflation et un territoire qui importe 87% de son alimentation.
La vie chère et indigne que connaît la Martinique et les outre-mers en général n’est pas anodine : la politique coloniale de l’État français oblige ces territoires à importer leurs biens de consommation depuis la métropole, via les entreprises nationales – Carrefour, Auchan et compagnie – malgré une distance immense et en dépit de la proximité des pays de l’espace caraïbe. Ça se traduit par l’imposition du modèle capitaliste, la destruction des jardins créoles, la dépendance vis-à-vis de la métropole, et un chômage structurel. On vend aux jeunes qu’il n’y a pas d’avenir sur place et qu’il faut partir se former en métropole.
Un continuum colonial
Tout ceci s’inscrit dans un continuum colonial de la gestion des « outre-mers ». Plus de 1 milliard d’euros pour rendre la Seine baignable, mais toujours des pénuries d’eau potable en Guadeloupe, des prisons et écoles surchargées, une interdiction de la langue créole sur les documents officiels, une société racialisée, un maintien des monocultures d’exportation coloniales, un empoisonnement de masse et durable au chlordécone (pesticide utilisé jusqu’en 1993) aux Antilles où plus de 90% de la population est contaminée, des violences policières hors normes durant la crise Covid, les essais nucléaires en Polynésie jusque dans les années 1990, un visa spécifique à Mayotte avec les violences et tirs à balles réelles durant les opérations Wuambushu 1 et 2… L’Agence régionale de santé de Mayotte « conseille » la stérilisation aux jeunes femme sur l’île comme on avortait sur l’île de la Réunion en masse des jeunes femmes sans les prévenir dans les années 1960 et 1970 pour le contrôle colonial de la démographie.
Les outre-mers n’ont pas « choisi » la France, comme en témoigne la contre-révolution coloniale durant la période des décolonisations, qui s’est traduite par l’écrasement des collectifs et partis indépendantistes. Soixante ans plus tard, la France est toujours une puissance coloniale, qu’elle ait departementalisé, que ses colonies n’en soient officiellement plus, ou bien que l’Etat français maintienne sa présence militaire et ses accords de coopération en Afrique.
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