Rendez-vous à Bellecour : un dispositif de nasse classique sur la place.
La manif avait été interdite par la préfecture, qui avait instaurée des périmètres d’interdiction de manifester très larges. Malgré cela, le rendez-vous a été maintenu. 1000 personnes se retrouvent alors sur la place à partir de 13h. On y entend beaucoup de groupes venus de l’extérieur, avec a priori peu de lyonnais.es. Les présent.es sont globalement bien matossé.es, dès le début.
Balayage du nord-ouest au sud-est pour trouver un échappatoire
Jusqu’à 15h se succèdent des tentatives de percées hors de la place du nord-ouest au sud-est. La tension se concentre à partir de 14h à l’angle de la rue qui va vers le pont Bonaparte : gazages et première charge déjà très violente, où on voit des journalistes se faire littéralement tabasser avec une dizaine de coups de matraque et un coup de pied au visage :
C’est là que la police tire les premiers flashball et fait un blessé grave au visage.
La tentative suivante se fait au milieu de la rue Gasparin, avec gazage systématique, avancée/recul des manifestant.es.
Les affrontements débutent réellement à Antonin Poncet : une benne à verre est renversée, ça caillasse copieusement vers le pont de la Guill ; en réponse, les vilains sortent le canon à eau. Pendant ce temps-là, la BAC est positionnée à l’angle de la Poste. Ça a été un beau moment d’intelligence collective : tandis que la majorité des manifestant.es affrontait les gaz et les flashball vers la place A. Poncet, quelques personnes en retrait ont pu suivre les déplacements de la BAC et prévenir la prise en tenaille, ce qui a permis qu’assez de personnes refluent vers Bellecour et empêchent le nassage . Le face-à-face se cristallise ensuite vers le Monop’, avec gazage et répliques de projectiles.
La BAC recule devant les charges des manifestant.es
Arrive enfin ce qui va changer le rapport de force. Se croyant toute puissante, la BAC se détache de la Poste pour venir se positionner au milieu de la place, préparant sans doute une charge pour coincer les manifestant.es vers l’angle nord-est. C’était sans compter sur une énergie collective admirable qui a enchaîné deux charges sur la BAC.
C’est alors plusieurs centaines de personnes qui foncent vers eux accompagnées d’une pluie de caillasses. On voit la BAC qui essaye de tenir sa position en tirant beaucoup de LBD, mais elle est obligée de se replier, et finit par s’abriter derrière les kiosques à fleur du sud, puis derrière l’office de tourisme, laissant libre la rue Victor Hugo.
« Et Hugo il est à qui ? Il est à nous ! »
Un cortège de plusieurs centaines de personnes s’engouffre immédiatement dans la rue Victor Hugo. L’ambiance est à l’euphorie : hurlements de joie et sentiment de petite victoire d’avoir réussi à déjouer la nasse de Bellecour donnent vite lieu à un saccage en règle de la rue jusqu’à Ampère. Des barricades sont érigées sur les rues latérales avec le matos de chantier disponible, les vitrines des banques tombent une par une, des chiottes de chantier sont en feu.
Le cortège avance très vite, ce qui permet de ne pas se faire coincer à Perrache. En fait, les vilains ont pris beaucoup de temps à refermer la rue V. Hugo au niveau de Bellecour grâce à une bonne centaine de personnes qui sont restées pour maintenir la pression, en incendiant notamment les parasols. Après 5 minutes de liberté, la BAC charge la queue du cortège au niveau d’Ampère, provoquant la dispersion rapide de la sauvage. Il y a à ce moment quelques interpellations, mais un groupe d’une 50aine de personnes réussit à rester ensemble et va jusqu’à Perrache, où une nouvelle charge finit par disperser le groupe. Au même moment, une autre 50aine de personnes se retrouvent et parviennent à traverser le pont Kitchener-Marchand jusqu’au Vieux-Lyon, mais on ne sait pas très bien ce qu’il s’est passé.
Retour au point de départ et déchaînement de violences policières
Malheureusement, alors qu’un rendez-vous en cas de dispersion avait été donné ailleurs, tout le monde se retrouve sur la place. C’est le début de 2 heures d’affrontements où se succèdent attaque et contre-attaque au niveau de l’angle de la rue de la Barre. Sans doute frustrés d’avoir été débordés, les flics sont très violents, ça canarde au flashball, et il y a beaucoup de blessés, dont 3 au visage.
Manif aux flambeaux dans X-Rousse et petite sauvage jusqu’à Bellecour.
La bonne ambiance est au rendez-vous, les chants et les slogans s’enchaînent. Le parcours est ponctué par des prises de parole devant des lieux symboliques de la politique anti-sociale de l’Etat (hôpital, agence de quartier SNCF, lieux de luttes des Canuts). Si beaucoup de personnes s’arrêtent à la place Sathonnay, un groupe d’une 50aines poursuit jusqu’à Terreau où les flics gazent, obligeant toutes les terrasses bondées à ranger leurs tables. Suit une petite sauvage jusqu’à Bellcour qui se disperse rapidement.
Bilan
- Ce samedi nous dit d’abord que les appels nationaux ont encore un sens stratégique. D’un point de vue général, ils permettent de constituer une force suffisante pour marquer la continuité du mouvement des GJ. D’un point de vue contextuel, cet appel a fait preuve d’une belle offensivité qui donne le ton, une semaine avant l’appel de samedi 14 à Paris.
- À l’échelle de Lyon, ce samedi était assez exceptionnel. Le dispositif policier qui nous étouffe depuis des mois a enfin été désorganisé. Même si nous avons sans doute profité d’erreurs de la part des flics, la persévérance des manifestant.es, leur préparation (surtout en projectiles) et leur coordination a permis de pousser le rapport de force assez loin pour s’engouffrer rue V. Hugo. Les manifestant.es n’ont pas hésité à saisir l’occasion au moment où elle se présentait : la rapidité des prises de décisions et des déplacements a été déterminante. Ça faisait longtemps qu’on n’avait pas senti ce sentiment de confiance collective. C’est une petite réussite tactique, mais qui n’a pas été sans conséquences en termes de blessés graves (3 au visage, dont une double fracture de la mâchoire pour un jeune de 16 ans, et une joue arrachée pour un street médic de lyon) et d’interpellations (7 de trop).
Force est de constater que parmi les 20 blessé.es recensé.es par les street médics, la majorité a été touchée après le retour à Bellecour, suite à l’envolée rue V. Hugo. Peut-être que multiplier les rendez-vous après dispersion et s’y tenir aurait donné un autre tournant à cette journée. On en ressort quand même gonflé.es et motiv.ées !
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