Pourquoi risquer sa vie ou meurtrir son corps pour un idéal auquel l’on ne croit pas ? Les militaires, unis avec leurs amis les politiciens et les marchands d’armes, n’ont eu de cesse d’envoyer au casse pipe des innocentEs qui n’avaient rien à voir avec leurs sales guerres. Ainsi des générations entières ont été massacrées et bien souvent les militants syndicaux ou politiques étaient envoyés en première ligne.
D’autres raisons motivent notre rejet du militarisme. En effet, la CNT dénonce également le complexe militaro-industriel parce qu’il est synonyme d’oppression au travail. Combien d’heures d’exploitation accrue (rebaptisé pour l’occasion « effort de guerre ») ont dû subir les prolétaires pour financer l’armée ? N’oublions pas que le patronat ne s’est jamais autant enrichi que pendant les guerres (souvenons nous des très florissantes affaires des tanks Renault ou des gaz Bayer en 14-18) alors que la population était condamnée à se serrer la ceinture. De plus, ce patronat n’a jamais de patrie quand il s’agit de s’enrichir (en 14-18, des industriels français vendaient des obus à l’armée allemande par le biais de la Hollande).
Le militarisme est aussi l’occasion de développer un nationalisme exacerbé et aveugle. Il oppose les prolétaires des différents pays tout en justifiant un consensus autour des chefs et des forces répressives de l’État : la fameuse
« union sacrée ». Ainsi l’actuelle guerre « perpétuelle » contre le terrorisme a justifié la mise en place de lois d’exception (par exemple le plan vigipirate) qui sont devenues la règle. Autrement dit, le délire sécuritaire et guerrier a pris le pas sur les modestes libertés individuelles qu’autorisent nos démocraties parlementaires. Aujourd’hui, personne ne s’étonne de voir des militaires armés jusqu’aux dents se promener dans les rues ou dans les gares, comme si cela était entré dans la vie quotidienne.
Les guerres coloniales, à l’échelle nationale comme à l’échelle internationale, ont permis aux États impérialistes de piller les richesses des contrées occupées et d’asservir une main-d’œuvre bon marché réduite en esclavage. Ce fut également un moyen d’imposer la vision universaliste de nos dirigeants (la culture capitaliste ou pensée unique, la religion chrétienne ...) au détriment des cultures locales. Les luttes d’indépendances, notamment en Algérie, étaient nationales mais elles étaient aussi basées sur des revendications de libération sociale et culturelle. On pourrait croire que les guerres coloniales ont disparu, pourtant les évènements récents au Togo ou en Côte-d’Ivoire viennent nous rappeler que la France continue à opprimer ses anciennes colonies. Pour conserver ses intérêts économiques elle impose ses amis dictateurs, ses réseaux mafieux et continue d’occuper le terrain militairement. L’affaire Elf, les trafics d’armes vers l’Angola ou le soutien aux génocidaires rwandais en sont l’illustration.
Si la CNT est résolument antimilitariste cela ne signifie pas qu’elle est une adepte du pacifisme. Face aux agressions du capital la violence paraît légitime. La CNT combat les armées - qu’elles soient bleues, blanches ou rouges, étatistes ou privés - mais elle participe à la guerre de classe. Il est grand temps de trouver nos propres armes, nos propres outils de luttes, car le capitalisme ne s’écroulera pas de lui-même. Le syndicalisme révolutionnaire et l’anarcho-syndicalisme sont un de ces outils, il doit redevenir une machine de lutte internationale contre le capitalisme mondialisé. L’émancipation des travailleurs et travailleuses ne passera pas par le cloisonnement dans des frontières nationales ; qui peut croire qu’un espace géographique délimité et dirigé par une élite peut représenter le peuple ? Si au lieu de nous entre-tuer nous nous fédérons toutes et tous dans un esprit solidaire, nous pourrons enfin concentrer nos énergies contre nos ennemis communs : les États, le patronat et le salariat (les organismes supra nationaux comme l’OMC ou le FMI ne seront pas oubliés). La violence du peuple « n’est que la réplique, bénigne et humaine, aux violences excessives et barbares de ses maîtres »
(E. POUGET).
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