Selon la déclaration de la police : « dans la nuit du lundi et mardi 28 avril, aux alentours de 3 heures du matin deux ados roulent dans une voiture dans le centre de Clermont. Croisant une patrouille de police, les jeunes tentent d’échapper au contrôle et s’encastrent dans un magasin. Le conducteur de 14 ans meurt sur le coup et le passager de 16 ans gravement blessé. »
Il est consternant, comme à l’habitude, de voir combien la presse censée être libre et indépendante, s’avère en réalité davantage assimilable à une chambre d’enregistrement des déclarations des flics.
En effet, une rapide investigation via un moteur de recherche à l’aide des mots clés « Clermont-Ferrand police » nous affiche près de 30 articles en provenance de sites d’information, alignant avec exactitude les mêmes titres (à un mot près) et le même contenu.
Si tous se revendiquent d’avoir obtenus leur information auprès de l’AFP, la source de l’AFP n’est dans cette histoire personne d’autre que les propos rapportés de la police [1]...
Les flics ne se contentent pas de raconter leur propre version, ils font fuiter à l’AFP des informations de l’enquête expliquant que le jeune est un délinquant connu et que la voiture est volée.
"Il n’a que ce qu’il mérite" peut-on lire en trame de fond avec ce titre horrible repris par toute la presse : "un jeune de 14 ans se tue en fuyant un contrôle de police".
Fin de l’enquête journalistique, il s’agit d’un fait divers, un délinquant juvénile dans une voiture volée a eu peur en voyant la police et s’est pris un mur.
Inventer des informations non sourcées ni coroborées que l’on fait "fuiter" semble être une ficelle bien grosse pour passer auprès de journalistes aguéris. Pourtant, aucun ne semble tirer la moindre leçon de cette manipulation constante des flics. Pas besoin de remonter bien loin pourtant... Le 29 octobre 2019 à Villiers-le-Bel, lorsque Ibrahima B. est percuté par un camion de police, quelques heures plus tard, le préfet lâche un communiqué à l’AFP affirmant sans conditionnel que la moto-cross d’Ibrahima était « non-homologuée », donc « signalée volée ». Les journalistes reprennent à l’époque l’info comme de bons chiens de garde du système. Pourtant, le lendemain, on s’aperçoit qu’en réalité Ibrahim.B était bien propriétaire de son véhicule.
Il s’agit à chaque fois de la même combine, faire passer les victimes pour des délinquants afin de leur retirer toute légitimité à endosser le statut de victime, et rappeler indirectement qu’ils l’ont bien mérité et que la Police a "nettoyé" la ville de petites crapules... Pourtant les délinquants qui tuent et meurtrissent les chairs sont bien les flics...
La mise au point du procureur de la République de Clermont.
Contrairement aux journalistes laxistes, les gardiens du système savent faire évoluer leurs tactiques. Sachant que les mensonges de la justices sont systématiquement attaqués par une population aux aguets à Clermont, le Proc quelques heures après la dépêche, fait un communiqué indiquant que finalement la voiture n’aurait pas été volée. La voiture avait simplement été empruntée à la petite amie du passager et les jeunes ne s’avèrent finalement pas être des délinquants notoires, mais simplement "connus des services de police" [2].
Pourtant les "journalistes" des rédactions nationales sont passés à autre chose et ne semblent pas vouloir prendre la peine de mettre à jours leurs articles. En même temps, le titre et l’info étaient trop croustillantes. Minimiser l’implication de la victime et dire qu’au final il s’agit simplement de deux potes qui s’ennuyaient, qu’ils ont voulu rigoler un coup et que, s’ils n’avaient jamais croisé la police, ils seraient toujours en vie, semble moins vendeur pour les réseaux sociaux ... pourtant, c’est leurs mémoires qui ont été salies d’un simple copié/collé crasse sans aucune question.
Ne soyons pas dupes, s’il est intéressant de voir ici que seul le journal local de Clermont, "La Montagne" a fait l’effort de mettre à jour son article avec ces nouvelles informations, c’est pour mieux constater son inactions à émette le moindre doute sur ce que les flics et la justice lui sert et fait par là mine d’enquêter alors qu’il n’en est rien. Il s’agit bien de tuer dans l’œuf toute justification possible de révoltes des amis des victimes.
Circulez, il n’y a rien à voir, regardez la justice fait son travail, semble dire en sous-titre le Proc de Clermont !
On le sait, malheureusement, seule une révolte du quartier et des poubelles incendiées pousseront les journalistes à revenir se pencher sur cette mort ... Et le Proc’ aura beau jeu de dire que cette révolte n’est pas justifiée et d’envoyer sa police postcoloniale mater toute tentative de réclamer justice un peut trop fort.
De simples questions auraient dû être soulevées par les journalistes
La Place des Salins est en fait un grand parking quasi vide la nuit. Les jeunes s’amusaient donc sûrement seulement à apprendre à conduire comme les jeunes ruraux apprennent sur des chemins de terre et n’avaient sûrement pas l’intention de bouger du parking sans l’arrivée de la voiture de flics.
Mais la police est-elle entrée sur le parking ? Surveillait-elle les jeunes depuis longtemps ? A-t-elle mit son gyrophare ? Selon le Proc’ les flics se sont rendu compte dès le départ qu’il s’agissait d’ados au volant. Dans ce cas, engager une poursuite était-ce vraiment approprié ? Les conducteurs de la voiture de police étaient-ils en état d’ébriété ? Pourquoi ont-ils tourné en pleine ligne droite en pleine nuit [3].
Le Proc dit que le conducteur aurait paniqué. Mais qu’est-ce qui l’a fait paniquer à cet endroit précis plutôt que 100m avant ?
Des questions, il y en a en réalité beaucoup, et il ne fait nul doute que, comme d’habitude, la famille n’aura jamais toutes les réponses.
Pourtant, un fait similaire relie ce nouveau mort aux 5 autres morts de ces précédentes semaines : la peur inconditionnelle de tous les jeunes des quartiers populaires à l’égard de la police. Depuis toujours, elle humilie, frappe et tue, avec 673 meurtres policiers recensés en 43 ans, auxquels s’ajoutent 6 ces derniers jours et de nombreux mutilés
Ces jeunes venaient d’ailleurs du quartier du la Gauthiere, le quartier d’où venait Wissam El Yamni tabassé à mort dans un couloir du commissariat de Clermont-Ferrand le 1er janvier 2012
Les quartiers ont une mémoire et tous savent que quand la police s’approche la nuit sans témoin, quel que soit le motif, il vaut mieux fuir, au risque de sa vie ...
Le système policier a encore tué, les flics ont tué, la police assassine. Pensée aux familles et à toutes les victimes
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