Bayer et l’ONU

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Biovision/Biosquare

Pourquoi lutter contre Biovision/Biosquare ? Pourquoi lutter contre les multinationnales qui vont profiter de cette foire à Lyon du 11 au 14 mars 2007 ?
Pour mieux comprendre, voici comment l’entreprise multinationale Bayer traite sa relation avec l’ONU et son image de marque au niveau global. C’est un article sur Bayer mais il aurait bien pu être sur BASF, Monsanto, Aventis...
N’oublions pas que le siège de Bayer Cropscience (importante entreprise productrice d’OGM, entre autres...) est à Lyon, dans le quartier de Gorge de Loup, à l’angle de la rue sergent Berthet et Jean-Marie Leclair...

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Bayer et le partenariat Global Compact de l’ONU

Comment et pourquoi une multinationale pharmaceutique et chimique se refait une vertu !

Bayer ne produit pas que de l’aspirine. C’est un important producteur de produits chimiques et de médicaments doté d’une curieuse histoire. Comment cette entreprise a-t-elle obtenu de former un partenariat avec l’ONU ? Un militant allemand nous explique comment et pourquoi.

Bayer se considère comme un membre fondateur de Global Compact, le partenariat que les grandes entreprises ont mis en place avec l’ONU. Mais son engagement à défendre les neuf principes concernant les droits de l’homme et l’environnement établis par Compact doit être lu dans le contexte de l’histoire extrêmement controversée de l’entreprise elle-même. Une partie de cette histoire est décrite dans cet article de Philipp Mimkes de la Coalition Contre des Dangers émanant de Bayer (CBG). CBG a constaté que Bayer a utilisé son « adhésion » à Compact pour esquiver les critiques des associations. L’utilisation par Bayer du partenariat avec l’ONU, Global Compact, est un cas classique de recyclage qui permet de se servir de la réputation des Nations Unies pour présenter une image d’entreprise humanitaire sans s’obliger pour autant à modifier son comportement dans le monde réel.

La plupart d’entre nous, lorsqu’ils entendent la marque « Bayer » pensent à l’aspirine. Mais Bayer AG, basé dans le Leverkusen, en Allemagne est d’abord un producteur de produits chimiques, pharmaceutiques, de pesticides et de plastiques. La société emploie 120.000 personnes dans le monde entier et son chiffre de ventes annuelles est d’environ 28 milliards de $. Les Etats-Unis sont son plus grand marché mais la société a aussi des installations au Mexique, au Brésil, en Afrique du Sud, en Inde, en Thaïlande, en Chine, au Japon ainsi que dans beaucoup de pays européens.

Bayer est par ailleurs membre de Global Compact (pacte global) (N.d.T : voir le Monde Diplomatique) un partenariat entre les Nations unies et des grandes entreprises. L’entreprise s’est engagée volontairement sur neuf points concernant les droits de l’homme et l’environnement. En échange, elle peut utiliser le nom et le logo de l’ONU, tandis qu’une gamme de programmes d’ONU espèrent recevoir des financements en provenance de ces multinationales.

Quelques uns des crimes d’entreprise commis par Bayer

Bayer privilégie depuis longtemps les profits sur les droits de l’homme et les soucis environnementaux. Pendant la Première guerre mondiale, la société a inventé la Guerre Chimique (« gaz humide ») et a créé « une École pour la Guerre Chimique. » Trente ans plus tard Bayer faisait partie du conglomérat IG Farben, qui a travaillé étroitement avec le troisième Reich. IG Farben a exploité plusieurs centaines de milliers d’esclaves dans son usine d’Auschwitz. Il a aussi repris des sociétés partout en Europe et a employé des cobayes humains pour la recherche pharmaceutique. La filiale Degesch de IG Farbens a fabriqué le gaz toxique Zyklon B employé dans les chambres à gaz. À la fin des années 30 les organophosphates (sarin, tabun) ont été commercialisés par Bayer comme des pesticides (E 605, Folidol, Nemacur, Fenthion). Par la suite certains dirigeants de IG Farben seront même reconnus comme criminels de guerre au Procès de Nuremberg.

Après la guerre IG Farben a été partagée entre BASF, Bayer et Hoechst (renommé Aventis) et les trois sociétés qui coopèrent toujours étroitement ont une grande influence aussi bien sur la politique allemande qu’européenne.

Lobbying d’entreprise

Bayer utilise son poids économique comme un levier dans l’arène politique. Depuis les années 1920 la société a financé des partis politiques allemands et plusieurs de ses dirigeants ont été ministres dans des gouvernements allemands.

Aujourd’hui, Bayer est membre de centaines de lobbies qui s’opposent aux « barrières commerciales » que constituent les diverses réglementations sur l’environnement, la santé et la sécurité. L’European Round Table, lobby industriel européen, contribue efficacement à la rédaction de grandes sections la législation industrielle de l’UE.

Bayer a aussi contribué à fonder le Transatlantic Business Dialogue, où des multinationales européennes et américaines travaillent ensemble pour influencer la politique dans le sens d’une libéralisation et d’une déréglementation plus grandes.

Mis à part Bayer d’autres groupes de lobby y jouent un rôle actif. Ils s’agit de la Chambre Internationale de Commerce, la Fédération mondiale pour la protection des cultures (Global Crop Protection Federation) , l’Association de l’Industrie Chimique Allemande (German Verband der Chemischen Industrie) et la Fédération nationale de l’industrie allemande (Bundesverband der Deutschen Industrie).

Enfin, Bayer a soutenu la campagne électorale du Président Bush en lui apportant 120.000 $. Les cinq dernières années Bayer a distribué plus de 600.000 $ aux politiciens américains.


Membre fondateur du partenariat Global Compact avec l’ONU

Deux successeurs d’IG Farben - Bayer et BASF - ont participé à Global Compact lors de sa fondation en juillet 2000. Bayer communique beaucoup sur sa coopération avec l’ONU, en imprimant par exemple un éditorial du Secrétaire général de l’ONU., Kofi Annan, dans son "Rapport sur le Développement Durable".

Le site Web de la société et son Rapport annuel consacrent une section spéciale à Global Compact. Pour témoigner de son engagement pour les principes de Global Compact la société donne quatre exemples de ses mérites :
- son appui financier au Brésilien Abrinq, fondation pour les Droits de l’Enfant, qui lutte contre le travail des enfants ;
- le don de deux produits pharmaceutiques contre la maladie du sommeil à l’Organisation Mondiale de la Santé ;
- ses efforts pour contrôler la diffusion de la résistance aux antibiotiques ;
- ses programmes de formation pour les ouvriers des fermes brésiliennes et les petits cultivateurs afin de leur apprendre à manipuler les pesticides convenablement.

De plus, Bayer a fourni des médicaments après des tremblements de terre en Inde et au Salvador et a fait don de un million de dollars ainsi qu’un équipement de lutte anti-incendie aux sociétés de secours après les attentats du 11 septembre contre le World Trade Center.

Bayer ne divulgue pas de chiffres sur ses efforts pour combattre le travail des enfants au Brésil ou ses contributions au WHO mais la Coalition Contre des Dangers Emanant de Bayer a appris que ces dépenses sont inférieures à 1 million de $ pour chacun des projets.

Dans le même temps et parallèlement à ces contributions somme toute modestes, les impôts payés par Bayer sont passé d’environ 1 milliard de $ en l’an 2000 à 132 millions de $ en 2001. Les réductions d’impôt se sont élevées à plus de cinquante fois le total des donations philanthropiques de la société. A supposer que les donations de Bayer aillent toutes à de bonnes causes, le public est loin de gagner au change étant donné les réductions d’impôt dont Bayer a bénéficié.

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Étude de cas : l’initiative « Agrovida »

Bayer est le troisième producteur mondial d’herbicides et domine le marché des insecticides. Ces derniers sont responsables de la majorité des empoisonnements par pesticides dans les pays au Sud. L’Organisation Mondiale de la Santé compte annuellement 2 millions d’empoisonnements par pesticide et évalue que le nombre de cas non déclarés à probablement plus de 10 millions. Environ 200.000 personnes par an meurent d’empoisonnements dus à des pesticides, selon le WHO.

En 1995 Bayer a promis de retirer de la circulation ses pesticides les plus toxiques, mais l’entreprise est loin de l’avoir fait alors qu’elle continue toujours à vendre des pesticides évalués par le WHO comme « extrêmement » ou « fortement » dangereux. Bayer prétend que c’est aux utilisateurs de pesticides de prendre leurs précautions, sachant que les ouvriers agricoles sous-payés ont rarement accès aux informations concernant la santé et la sécurité.

Pour "réduire au minimum les risques pour les personnes et l’environnement" Bayer a mis en place l’initiative "Agrovida" en Amérique Latine. Plusieurs milliers de personnes dans les zones rurales du sud du Brésil ont été formées à ce que la société appelle une utilisation saine des pesticides. Selon Bayer le programme est adapté à l’agriculture durable. "La partie concernant les stratégies de protection des récoltes est concentrée sur la sécurité de l’utilisateur, le stockage approprié de produits utilisés pour la protection des récoltes, la maintenance de l’équipement et la conservation prudente des conteneurs vides," note la société.

L’entreprise admet aussi que "la campagne de formation ne constituait peut-être qu’un petit pas en termes de secteur couvert, mais c’était certainement un pas vers l’avenir si on considère ce le modèle qu’elle pourra devenir pour d’autres régions du monde". La formation de "plusieurs milliers de personnes" est peut-être utile, mais que fait-on des millions de fermiers dans les pays qui emploient les produits fortement toxiques de Bayer et qui n’ont n’ont jamais reçu d’instruction ?

Bayer contrevient régulièrement au code de conduite de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) - qu’elle a signé. Ce code stipule que les pesticides ne doivent être vendus qu’à des professionnels certifiés portant des vêtements protecteurs et jamais au grand public.

Même au Brésil, où Agrovida est installée, Baysiston, le pesticide numéro un sur le marché, a empoisonné des centaines de cultivateurs de café, et pour au moins trente d’entre eux mortellement. La publicité omniprésente de Baysiston camoufle les risques. Beaucoup de cultivateurs de café s’imaginent même que Baysiston est un engrais qui augmente les rendements. Le Procureur qui a examiné le cas s’est plaint de ce que la publicité présente le produit comme inoffensif, ignorant ses risques potentiels. Bayer a déclaré que la société était consciente des cas d’empoisonnement de Baysiston, mais que ceux ci n’étaient pas dus à un manque d’information, mais uniquement "à un usage non expérimenté."

Suivant des rapports parus dans les mass-media allemands et brésiliens, la société a fait pression sur les administrations locales et les médecins pour qu’ils minimisent les inquiétudes portant sur les risques induits par ses produits. La société a aussi menacé de poursuivre en justice les communautés qui avaient l’intention de limiter l’utilisation de Baysiston. (certaines malgré tout ne se sont pas laissées faire.) Bayer est entré en contact avec des hôpitaux pour leur déconseiller d’évoquer une " intoxication Baysiston," ou même "empoisonnement au pesticide" sur les actes de décès officiels. Plus tard, la société a fait don financier à un groupe de médecins qui coopéreraient avec sa couverture. Selon le Syndicat Agricole brésilien, les empoisonnements dus à Baysiston arrivent quotidiennement, mais apparaissent rarement dans les rapports.

Étude de cas : Antibiotiques et Bactéries Résistantes

Bayer est un important producteur d’antibiotiques, y compris le fluoroquinolones Cipro pour les personnes et Baytril pour les animaux. L’efficacité de beaucoup d’antibiotiques de dernier recours est, cependant en voie de diminution. Les experts de la santé considèrent la hausse de la résistance aux antibiotique comme une véritable une crise de santé publique. Bayer prétend lutter contre le problème en mettant en place une nouvelle initiative qui « vise à travailler avec des organisations de santé importantes ainsi que des experts pour aider à lutter contre la menace croissante causée par les bactéries développant rapidement une résistance aux antibiotiques d’aujourd’hui. Il s’agit d’un problème sérieux affectant des pays en voie de développement aussi bien que des états industrialisés. »

Bayer fait de son adhésion à Global Compact comme une motivation supplémentaire pour mettre en place le programme. « L’Article 25 de la Déclaration Universelle de Droits de l’homme (UDHR) déclare que chacun a droit à un niveau de vie, de santé et de bien être pour lui comme pour sa famille. Le projet est tout à fait conforme à l’Initiative Global Compact et à ses objectifs. »

Mais en réalité les activités de Bayer contribuent elles-mêmes à la hausse du nombre de bactéries résistantes : l’une des principales raisons de résistances est le fait que l’on alimente des animaux de ferme en bonne santé avec des quantités excessives d’antibiotiques pour favoriser la croissance et compenser les mauvaises conditions d’hygiène.

L’Union des Scientifiques militants, The Union of Concerned Scientists, estime que 70 % de tous les antibiotiques distribués aux Etats-Unis sont fournis à des porcs sains, à la volaille et au bétail. Les conditions presque idéales pour précipiter le développement des résistances sont créées du fait même que l’on donne de la fluoroquinolone à des masses entières d’animaux et en l’additionnant à leur eau potable de manière aléatoire L’Association Médicale américaine a publiquement exigé un arrêt de l’utilisation d’antibiotiques dans l’élevage pour des animaux sains.

En octobre 2000, l’Organe de certification des aliments et des médicaments des EU (FDA) a proposé d’interdire l’antibiotique fluoroquinolone pour le traitement de la volaille. Les scientifiques de la FDA ont affirmé que l’utilisation de l’antibiotique dans les élevages de poulets et de dindes a précipité le développement de Campylobacter fluoroquinolone-résistant. Suivant les évaluations de la FDA le Campylobacter contamine jusqu’à 80 pour cent des poulets grillés vendus dans certains supermarchés. La communauté médicale aussi bien que les associations d’intérêt public ont fortement soutenu la proposition de la FDA. Les Laboratoires Abbott, qui produisent de la fluoroquinolone pour volaille, ont suivi les recommandations de la FDA en retirant le produit du marché. Cependant, la Société Bayer, seul producteur restant, a exigé une audition formelle, engageant un processus qui va probablement mettre des années avant de s’achever. Les médecins craignent le retard pris permette aux bactéries Campylobacter de continuer à renforcer leurs résistances aux taux actuels, rendant le problème grave.

Recyclage vert grâce au Global Compact

Bayer a une longue tradition dans le recyclage vert : La société a activement promu des termes comme « protection des récoltes » au lieu « de pesticides » et a largement adopté des expressions comme « Développement Durable » et « Soin Responsable. » La société promeut aussi à travers le monde l’idée d’engagement volontaire et non contraignant pour résoudre les problèmes environnementaux.

Ces dernières années les journalistes et les militants qui critiquaient les résultats de Bayer, étaient de manière routinière renvoyés aux engagements pris par Bayer dans le cadre de Global Compact. Le magazine de Washington, Multinational Monitor magazine, a fini par mettre Bayer dans sa liste « des dix plus mauvaises sociétés de l’an 2001. » La société s’y est retrouvée pour plusieurs raisons : le comportement de Bayer dans la crise de l’anthrax, lorsque la société a essayé de vendre excessivement ses antibiotiques au gouvernement américain ; le retrait du médicament pour réduire le taux de cholestérol, le Lipobay/Baycol qui a conduit à la mort d’au moins 100 patients ; le procès contre les militants de la Coalition contre des Dangers émanant de Bayer, pour avoir entretenu un site Web BayerWatch.com (le site est maintenant employé pour la Campagne Contre l’Abus d’Antibiotiques) ; et le refus de Bayer de retirer le Baytril du marché.

Après que plusieurs journaux allemands ont diffusé la liste des 1 à 100 pires sociétés, Bayer a publié une déclaration rejetant les accusations du Moniteur Multinational. « Le moniteur Multinational est l’organe d’une alliance de groupes d’activistes qui ont le but commun de critiquer les entreprises » selon Bayer qui a distingué la Coalition Contre des Dangers émanant de Bayer. "Bayer est un des membres fondateurs du partenariat Global Compact instauré avec le Secrétaire Général de l’ONU Kofi Annan, et mis en place en juillet 2001.

Dans ce cadre la société s’oblige à respecter neuf principes choisis par l’ONU dans les domaines des droits de l’homme, des standards sociaux et de la protection l’environnement," souligne la déclaration. Bayer n’a pas répondu à aucune des allégations, mais s’est contentée de critiquer ses critiques affirment les militants. La Coalition contre des Dangers émanant de Bayer a été poursuivie en justice par Bayer plusieurs fois.

PHILIPP MIMKES
par Jean Santerre (traduction)

Cet article est extrait du site de la Coalition Contre les méfaits de Bayer

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