« TOUS LES RESPONSABLES politiques, de gauche comme de droite doivent parler d’une même voix. L’heure est au rassemblement républicain pour éradiquer la gangrène, la barbarie. La sauvagerie. Il faut en finir avec le pourrissement social et moral, terreau de la haine et de la violence. (…) L’heure est à la mobilisation à tous les étages de la société. La situation est grave. J’aime la France et ne crains pas de dépasser l’esprit partisan. Les polémiques politiciennes et les rivalités personnelles sont dérisoires. Nous avons besoin d’un front républicain pour assurer dans la continuité la sécurité publique, la défense civile des citoyens. »
Qui a bien pu prononcer de telles paroles, le 7 novembre 2005, en plein cœur d’une révolte qui menace d’embraser toute la France ? Sarkozy, sûrement… Et non, c’est André Gerin, député, ancien maire de Vénissieux (il abandonne ce poste après 24 ans de règne), vieux patriarche du Parti Communiste Français et, accessoirement, vedette de ce mois.
En mars 2007, notre vedette a pondu une bible de l’Ordre : Les ghettos de la République. La préface est d’Éric Raoult, le fameux député-maire UMP qui avait été le premier à instaurer un couvre-feu dans sa commune pendant les émeutes de 2005, façon guerre d’Algérie. Le sarkommunisme c’est un peu ça : la droite qui préface la gauche, ou vice versa, réactivation du temps béni des colonies, quand les communistes votaient les pleins pouvoirs à la République pour mater les Algériens. Gerin attise un vieux populisme contre les « technocrates » et se revendique « homme de terrain ». Donc dans ses 139 pages républicaines, il nous dit toute la difficulté à exercer son mandat politique, parce que voyez-vous ma pauvre dame, en France, la police n’est pas assez efficace. En guise de remède, le vieux nous sort 13 mesures, telles que la « Création de Maisons de l’Intégration : structures interministérielles dotées de Casques Bleus de la République coordonnant les missions de police, de justice, d’éducation, de santé, de formation et d’emploi dans les territoires en difficulté ». Du tout en un. Ce « bon » maire aime les jeunes de Vénissieux, ceux qui sont occupés, qui dépriment en stages ou triment à l’intérim. Par contre, les « mauvais » jeunes, ceux qui ont repris leurs rues, faut les mater, en prison par exemple.
André Gerin, c’est un peu l’homme des sales boulots : il a été rapporteur de « l’avis du budget des services pénitentiaires et de la protection judiciaire de la jeunesse », initiateur d’un projet de loi sur la toxicomanie et membre d’une commission qui a travaillé sur les moyens de « dresser des pistes d’amélioration pour le contrôle extérieur des établissements pénitentiaires ». Tout un programme. Plus récemment, il a mis en place, avec l’appui de son équipe municipale, l’Office Public de la Tranquillité à Vénissieux, qui vise à prévenir tout incident tel que panne d’éclairage public, dégradation de cabines téléphoniques ou d’abris bus, etc. Depuis mai 2000, cette structure ouverte 24h/24, 7j/7, assure la « continuité du service public », et voilà que la République se met à tourner comme un Pizza-Hut. Il propose aussi de « décréter comme priorité nationale la prévention et le traitement de la délinquance des mineurs ». On vous l’a dit, un vrai bosseur ce Gerin.
- André Gerin
Dernièrement, ce vieux patriarche s’est mis en tête de défendre les femmes et le voilà parti en croisade contre le port de la « burqa ». Écoutons-le plutôt : « je ne veux pas entrer dans un débat technique sur la burqa ou le hijab. Ce que je vois ce sont des cercueils ambulants qui se promènent dans nos rues » ou encore « il faut montrer que l’on accepte pas ces coutumes moyenâgeuses ». Avec Sarkozy au pouvoir, le racisme du PCF peut à nouveau transpirer. Et les ordures sarkommunistes peuvent baver dans les médias : « N’importe qui peut se cacher sous la burqa ! », euh… oui, une femme par exemple ? Le 8 juin 2009, nouvelle offensive : une soixantaine de députés signent la demande de Gerin pour la création d’une commission parlementaire sur le port du voile intégral. Récemment, un UMPiste, qui ne doit pas trop aimer se faire doubler sur son propre terrain par les communistes, réplique en proposant d’interdire tout type de couvre-chefs ! 2009 est décidément une année textile : la « cagoule » interdite en manif après l’OTAN à Strasbourg, la « burqa » interdite dans la rue, et bientôt tout interdit tout le temps. Du voile à la cagoule, du fantasme de l’intégrisme à celui de l’ultra-gauche, d’un terrorisme à l’autre, la boucle est bouclée. Mais c’est pas avec des mesures vestimentaires que tu raccommoderas le tissu social, Gerin. Ta « société » est en lambeaux. Finalement pas si raciste, le vieux coco laïcard, puisqu’il se prononce pour l’intégration d’un « Islam apaisé et respectueux des principes républicains », à condition toutefois de « nettoyer la France » des prédicateurs qui « combattent la République ». A croire que le seul barbu qu’il arrive encore à tolérer, ce soit Robert Hue.
Gerin, c’est aussi le défenseur des pauvres gens contre la violence des jeunes-qui-brûlent-la-voiture-de-leur-voisin, « selon moi, les émeutes ont lieu tous les jours. Et les ingrédients sont rassemblés en permanence. Il suffit d’une étincelle pour que ça s’enflamme. (…) Est-on bien conscient que des gens honnêtes vont finir par faire leur propre loi et tirer dans le tas ? Ils en ont assez d’être assignés à résidence, et un jour ou l’autre ils commettront l’irréparable ». Donc autant leur donner un brassard orange – la République a déjà embauché des milliers de tarés dans la police depuis 2002. En avril 1978, lors du soulèvement de la plèbe italienne, le Parti Communiste Italien écrivait : « Les masses populaires, tous les citoyens aux sentiments démocratiques et civiques poursuivront leurs efforts pour apporter une précieuse contribution aux forces de l’ordre, aux agents et aux militaires engagés dans la lutte contre le terrorisme. » Le mot « terrorisme » désigne alors les ré-appropriations et auto-réductions à grande échelle, les manifs armées, le squat de rues et d’immeubles entiers, le refus de l’école, du travail, l’auto-défense des femmes… Les partis politiques restent toujours des partis de l’ordre. Au fond, c’est peut-être quand il joue les « Madame Soleil » qu’il se montre le plus pertinent : « je crois que le pire est encore à venir. Lorsque je dis que sont perceptibles les germes d’une guerre civile, je n’exagère pas. Je ne noircis pas le tableau. Au contraire je suis en-dessous de la vérité. Pour moi, on est réellement assis sur un volcan qui va nous « péter à la gueule ». Laissons le mot de la fin à ce maire si bien renseigné et peu avare de déclarations avisées : « les voitures brûlées sont le signe patent de l’énorme trafic de pièces détachées qui existe aujourd’hui ».
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