La loi sécurité globale a été définitivement adoptée hier par l’Assemblée nationale, à 75 voix contre 33, au terme d’un débat soumis aux exigences de la police et dont nous n’attendions plus grand chose (lire notamment notre analyse de l’examen en commission àl’Assembléeou au Sénat).
La prochaine étape sera l’examen de la loi par le Conseil constitutionnel. Nous lui enverrons bientôt nos observations. Avant cela, prenons un instant pour résumer les changements juridiques qui, sauf censure de la part du Conseil, résulteront de cette loi.
A. Surveillance
Tel qu’annoncé dans son récent livre blanc, l’objectif du ministère de l’intérieur est de faire entrer la police dans une nouvelle ère technologique pour les JO 2024, où la France pourra exposer son armement de pointe aux clients venus du monde entier – qu’il s’agisse d’armement jusqu’alors interdit (caméras par drones et hélicoptères) ou pré-existant mais que la loi sécurité globale va généraliser (caméras piétons et fixes).
1. Drones
- le préfet pourra autoriser la police et l’armée à capter des images par drone pour une période et un périmètre qu’il fixera ; l’autorisation pourra être justifiée par l’une des finalités listées par l’article 47 :
- « appui des personnels au sol en vue de maintenir ou rétablir l’ordre public » en cas de troubles graves ou difficultés d’intervention en manifestation ;
- « protection des bâtiments et installations publics […] particulièrement exposés à des risques d’intrusion ou de dégradation » ;
- « régulation des flux de transport » ;
- « surveillance des frontières » ;
- lutte contre le terrorisme et les infractions graves ou se produisant dans des lieux dangereux ou difficile d’accès.
- pour une période « expérimentale » de cinq ans, le préfet pourra autoriser la police municipale à capter des images par drones afin « d’assurer l’exécution des arrêtés de police du maire et de constater les contraventions à ces arrêtés » (article 47) – ces arrêtés pouvant par exemple concerner la taille des terrasses ou la fermeture d’un lieu ouvert au public ;
- les pompiers ainsi que les militaires et associations agréées de sécurité civile pourront aussi capter des images par drones afin de secourir les personnes et prévenir les risques (article 47) ;
- pour ces trois cas de captation d’images par drone, sont interdits la captation du son, l’analyse des images par reconnaissance faciale ainsi que les interconnexions automatisés avec des fichiers (article 47) ;
- les prises de vues doivent être « réalisées de telle sorte qu’elles ne visualisent pas les images de l’intérieur des domiciles ni, de façon spécifique, celles de leurs entrées » (article 47) – mais nous ne comprenons pas comment cette exigence pourra être satisfaite en pratique ;
- le public doit être informé « par tout moyen approprié » de la captation d’image par drone et de l’autorité responsable, « sauf lorsque les circonstances l’interdisent » (article 47) – ici encore, en pratique, nous ne comprenons pas comment l’information pourra être donnée ;
- en marge de ces règles, l’État pourra déployer des drones pour surveiller les établissements, installations et ouvrages d’importance vitale ainsi que les installations militaires (article 47) ;
- de même, les commandants de navire et d’avion de l’État pourront déployer des drones aériens, marins ou sous-marins dans le but d’assurer « le respect des dispositions qui s’appliquent en mer » en vertu du droit international et national. Le public doit en principe être informé de la surveillance, et cette surveillance doit éviter les locaux affectés à un usage privé ou d’habitation (article 49).
>Histoire de l’abolitionnisme pénal. Rencontre avec Shaïn Morisse, co-auteur de Brique par Brique.
L’idée d’abolir la police a fait surface, des États-Unis à la France, pendant les révoltes en hommage à George Floyd, tué par un policier le 25 mai 2020. Les mots d’ordre de couper les fonds de la police et de démanteler progressivement cette institution meurtrière ont de nouveau été entendus...
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