Qu’il faut que les femmes aient le même salaire que les hommes pour le même travail, ça me paraît évident.
Qu’elles puissent avoir le droit de vote, le droit d’avorter, qu’elles soient traitées en égales, c’est la putain de moindre des choses. Évidemment, il faut se bagarrer pour.
Nos ancêtres (merci à elles) se sont déjà bien bagarrées, et elles ont fait un énorme boulot. On est quand même pas si mal loties que ça en France au vingt et unième siècle grâce à elles, même s’il y a encore des combats à mener.
J’ai un respect infini pour les féministes des dernières décennies. (J’ai même été élevée par une, c’est vous dire…)
Mais quand même, pardon de le dire, à l’heure actuelle, aujourd’hui, je crois que s’il y a un truc qui me gonfle encore plus que les machos, c’est bien les féministes.
Y a des trucs essentiels, le salaire, le travail, tout ça. Mais le coup des jouets un peu trop roses, ou de la petite case sur un formulaire, un « madame » ou un « mademoiselle », mais SÉRIEUSEMENT, y en a qui ont de l’énergie et du temps à dépenser là-dessus ? On en a quoi à carrer, au juste, de cocher madame ou mademoiselle ? C’est insultant ? C’est une offense ? Sérieux ?
Qui est assez con pour penser que puisque les jouets sont roses ça veut dire qu’on est obligées de se mettre à l’aimer ?
Vous êtes pas assez tranquilles dans votre tête pour ne pas passer au-dessus de ça ?
Attends, l’autre jour en cours d’histoire, le prof arrive, il nous dit « Alors les garçons, vous avez pensé quoi du match de foot ce week-end ? », et là y a Mélanie Lemercier qui se met debout, limite elle monte sur la table, pour dire « Ouiiiiii, c’est dégueulaaaaassse, les filles aussi ont le droit d’aimer le foooooooot », patati patata.
Mais ÇA VA, quoi ! Je me sens suffisamment l’égale des hommes, j’ai assez confiance en moi pour pas avoir besoin de monter sur la table et d’enfoncer des portes ouvertes dès que quelqu’un fait une généralité un peu débile. Le mec a pas dit que les filles avaient pas le droit d’aimer le foot, il a juste fait une généralité un peu con, qui correspond quand même à un fait statistique….Voilà. Ça, c’est le discours que j’ai tenu pendant longtemps.
Et puis un soir, il m’est arrivé un truc moche. Vraiment moche.
Que j’hésite presque à vous dire, mais qu’il va bien falloir que je raconte pour continuer à dire ce que je vais essayer de dire.Je me lance… :
Un dimanche soir, à 21h52, j’ai découvert que j’étais raciste.
Moi.
MOI, BORDEL.
Moi qui ai été élevée par deux parents aimants et tendres et très ouverts et très de gauche, moi qui ai appris à 7 ans qu’on avait « jamais le droit d’être intolérant, sauf peut-être avec l’intolérance ».
Moi qui ai manifesté une seule fois dans ma vie, par honte, par désespoir, en avril 2002, alors que jamais aucun autre combat n’avait réussi à me faire lever mes fesses de mon canapé un dimanche de grasse mat.J’étais sur Twitter, et j’ai cliqué sur une vidéo. Ambiance « Caméra cachée dans la rue aux États-Unis, pour dénoncer les préjugés ambiants ».
Le truc, c’était de montrer un môme de 19 ans qui découpe à la pince l’antivol d’un vélo, en pleine rue et en plein jour. L’idée c’était de montrer un gamin blanc, et puis un gamin noir, dans la même mise en scène, et de comparer la réaction des gens.
La vidéo commence, avec le blanc, et faut bien avouer que je me serais pas retournée plus que ça non plus. Il avait une bonne bouille, et surtout un côté tellement décomplexé et normal, à pas se cacher, en pleine rue, en plein jour, comme ça, que ça donnait vraiment l’impression qu’il avait paumé ses clés comme tout un chacun et qu’il essayait de se débrouiller comme il pouvait pour récupérer son vélo.
Et la voix off s’offusquait : regardez comme personne ne dit rien ! regardez comme tout le monde passe à côté comme si de rien n’était !
Et je me disais que bon, ouais, c’était quand même un peu gros.
Et puis ils ont montré la même scène, avec le gamin noir.
Et là, vraiment, SINCÈREMENT, je vous jure, ça rendait pas pareil. Là mon bide a crié : « Aaaah, oui, là ok, oui ! Là on dirait un voleur ! », avant que j’aie eu le temps de réagir.
Ma tête s’est cabrée un peu. Elle a cherché pourquoi ça avait l’air d’une scène de vol alors que celle d’avant avait l’air d’une scène d’étourderie touchante.
Ma tête a crié : « Ouais mais attends, c’est normal, t’as vu comment ils l’ont habillé en racaille, aussi… », parce que le gamin avait une casquette à l’envers et un T-Shirt large.
Et, je vous jure que c’est strictement vrai et pas une espèce de manœuvre de style, à la SECONDE où ma tête terminait sa phrase de justification, la voix off disait « Et nous les avons habillés exactement pareil », en remettant côte à côte les deux images. Les deux gamins, la même rue, le même vélo, la même casquette à l’envers.
Malaise, malaise, malaise.
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