Le 30 mars dernier, Christophe Prudhomme, urgentiste à Bobigny en Seine-Saint-Denis et porte‐parole de l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF), s’exprimait au journal télévisé du soir. En colère, il a utilisé ces termes pour définir la gestion de l’épidémie par le gouvernement français : « C’est une débauche de moyens à visée médiatique qui ne paraît pas le plus pertinent. […] C’est plus simple de transporter un respirateur que de transporter un malade ». Il a sans doute raison et donne à penser qu’on est la cible au quotidien et confinés, d’une propagande sur des choix techniques et financiers incompréhensibles. Les cliniques privées ou les anciens hôpitaux militaires restent fermés alors que les discours au plus haut niveau annoncent un déploiement sanitaire sans précédent. Des batailles technologiques, scientifiques et politiques se croisent en même temps que le rôle de l’armée est mis en avant. Avec l’opération « Résilience » annoncée le mercredi 25 mars 2020 par le président de la République, depuis l’hôpital militaire de Mulhouse (Haut-Rhin), les cartes sont définitivement brouillées.
En première lecture, par cette opération, on peut naïvement croire que l’armée va venir en aide aux populations, à la « Nation », pour qu’elle surmonte dans les meilleures conditions la « crise » et qu’elle se sente « sécurisée ». Déjà lors de son allocution le 13 mars à 20 heures, le président employait ce ton martial, faisait référence au moins six fois à la situation de « guerre » que la France vivrait.
Pourtant, la mobilisation militaire est pauvre. Seuls un hôpital de campagne du service de santé des armées (SSA) a été ouvert à Mulhouse (capacité de 30 lits de réanimation), douze patients de Corse ont été évacués vers Marseille par la marine nationale, six autres l’ont été par voie aérienne vers l’Allemagne et la Suisse[1]et un soutien aérien a été mis en place pour transporter des malades vers des zones moins saturées (6 à 12 patients par vol). Des porte-hélicoptères amphibie (PHA), avec à leur bord un hôpital de 69 lits médicalisés, deux blocs opératoires et une salle de radiologie[2],ont été envoyés dans le sud de l’océan Indien et un autre le sera début avril dans la zone Antilles-Guyane[3]. En métropole et ailleurs, pas de couvre-feu, de barrages militaires, d’état d’urgence autre que sanitaire… Les forces de gendarmerie (armée) poursuivent leur travail quotidien, veillent aux côtés de la police au respect des restrictions à la circulation et aux regroupements. De leur côté, les soldats de l’opération Sentinelle continuent leurs patrouilles antiterroristes.
La priorité est plutôt donnée à la protection des militaires eux-mêmes qui auraient pu être touchés par le virus (base aérienne de Creil par où les rapatriés de Wuhan en Chine sont passés) et surtout au maintien des opérations en cours : dissuasion nucléaire (sous-marine et aérienne), sauvegarde des centres de commandement, poursuite des opérations à l’extérieur (opérations Chammal, Daman, Barkhane, en Syrie-Irak, Liban, Sahel) et à l’intérieur (sûreté aérienne, Vigipirate)[4].
En deuxième lecture, on assiste à une opération décomplexée de glorification de l’armée, mise en concurrence feutrée avec le corps médical public, dans le but de flouter les responsabilités et les alliances. La rhétorique est bien huilée. L’enjeu du discours et de ladite opération est de terroriser la population, la renvoyant à des incapacités supposées – « on ne peut rien faire », « on doit attendre »… –, et de faire taire les rebelles. Pour ne citer que cet exemple, depuis la réforme de la santé, les personnels des hôpitaux sont en lutte (contre la marchandisation et la privatisation du secteur) ce qui n’est pas le cas des personnels de l’armée dont le rôle est de respecter les ordres.
En troisième lecture, ...
>L’industrie du complotisme
Vous en avez marre des conspirationnistes qui voient des lézards géants partout ? Et en même temps vous ne supportez plus la petite musique des médias qui traitent de "complotiste" chaque personne qui remet en question l’ordre établi ? Pour nourrir la réflexion des mouvements sociaux...
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