Avec Une histoire sociale et politique de la conquête de l’Algérie publiée en décembre 2021 les éditions Terrasses poursuivent un cycle thématique sur l’Algérie au cours duquel elles ont expérimenté une collaboration active avec des collectifs d’auteurs et d’autrices afin de faire du livre une arme politique.
La Gryffe reçoit samedi 17 septembre à 15 heures, les auteurs Romain Bonnel et François qui viennent présenter un des résultats de cette collaboration :
De la guerre des Demoiselles à la reddition d’Abd el-Kader. Une histoire sociale et politique de la conquête de l’Algérie par la France dont ils résument ainsi le contenu :
« La Régence d’Alger naît au début du XVIe siècle. Il s’agit d’un État qui possède une histoire faite de rencontres conflictuelles entre plusieurs mondes. Il s’agit d’une société multiculturelle postée sur une terre dont la particularité est d’avoir une façade méditerranéenne importante permettant les échanges, le commerce mais aussi la guerre de course et la piraterie. Cela offre à la Régence de gagner en influence et de prospérer économiquement, le tout grâce à une armée de janissaires qui s’affranchit progressivement de l’Empire ottoman. Constituée par un ensemble de peuples autochtones qui vivaient largement de manière autonome, la Régence perd en cohésion sociale au début du XIXe siècle. Aussi, elle attend des remboursements de dettes importantes contractées par la France dont la première date de la Révolution. Au lieu de rembourser, l’État français s’arrange pour conquérir la Régence en juin 1830. Cette conquête se réalise en lien avec de riches industriels français qui vont obtenir un retour sur investissement conséquent grâce au pillage du trésor d’Alger. Pillage qui restera secret pendant plus d’un siècle.
Dès les premiers jours de l’invasion française, les Algériens vont entrer en résistance. Pendant 15 ans, cette résistance ingénieuse et déterminée sera conduite par l’Émir Abd el-Kader jusqu’à son abdication en 1847. Durant cette période, la France parvient à poser les bases d’une colonisation de peuplement qui n’a été possible qu’avec une force militaire redoutable, des outils bureaucratiques oppressifs et injustes, une instrumentalisation des femmes et une idéologie « de progrès » partagée par des fondateurs du socialisme, à savoir les saint-simoniens et autres fouriéristes qui ont apporté leur pierre à l’édifice colonial.
Mais est-ce que tout cela aurait pu se passer de cette façon si, exactement à la même époque, l’industrialisme puissant n’avait pas attaqué, main dans la main avec l’État, une certaine manière de vivre en communauté dans un respect simple et fort de l’environnement ? Pourtant, face à cette attaque systémique, des résistances populaires virent le jour. Dans les campagnes, c’est la guerre des Demoiselles qui marque l’opposition des paysans à la fin des biens communaux. Et dans les villes ce sont des travailleurs qui se révoltent en masse contre la déqualification et qui prennent conscience de leur identité d’exploités.
De la guerre des Demoiselles à la reddition d’Abd el-Kader, la conquête de l’Algérie par la France ne cache peut-être qu’une seule et même logique qui avance en synergie envers et contre tout : celle d’un développement industriel axé sur le profit générant un développement social se prétendant universel. »
Romain Bonnel, François Cerutti. Caen, le 07/09/2020
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