En préambule des décisions prises par les différents ministères, une simple déclaration du président Ebrahim Raïssi, parfaitement alignée sur la ligne politique défendue farouchement par le guide suprême : « L’obligation légale oblige chacune à se conformer à la loi, même si, pour une raison ou une autre, on ne croit pas au hijab. Mais l’adhésion à la loi fait qu’une société est régie par l’état de droit. » On pourrait demander au président Raïssi si un état de droit faisant fi des droits humains est encore un état de droit…
Quoi qu’il en soit, cette déclaration a lancé officiellement la nouvelle vague de répression des femmes en Iran. Désormais, le ministère de l’Éducation « ne fournira plus de services aux étudiantes qui ne respectent pas les règles du hijab ! » Le ministère des sciences, de la recherche et de la technologie « dispense les universités et les centres d’enseignement supérieur sous sa supervision de fournir des services éducatifs, sociaux, etc. aux quelques étudiantes qui ne respectent pas les règles et les règlements des universités à cet égard. » Quant au directeur de l’université Azad, le plus grand complexe universitaire d’Iran, il a tout simplement dit que « les institutions concernées sont tenues d’empêcher les étudiantes de venir à l’université avec des vêtements inconvenables . »
Suite à cette nouvelle propagande d’état, un certain nombre de magasins, de restaurants, de cafés et même de pharmacies et de cabinets médicaux ont été mis sous scellés dans plusieurs villes du pays, dont Qom et Chiraz. On se souvient que le 16 avril dernier, le guide suprême avait qualifié le non port du hijab de "haram charia et haram politique".
La raison de la résurgence de ces actions antiféministes du gouvernement est directement liée au rôle joué par les femmes tout au long du processus de soulèvement populaire. Le régime décide donc de s’attaquer à ce qu’il pense être la source de ses problèmes ; les femmes. Pire, il fait de cette question, qui semble subalterne vue d’occident, le point central de sa crédibilité, de son organisation religieuse et, par extension, sociétale. Certains imams du vendredi n’ont pas hésité ces derniers mois à lier intimement les questions de sécurité interne au port du hijab. L’un des commandants du Corps des gardiens de la Révolution islamique (CGRI) a même écrit que « la découverte du hijab [allait] au-delà d’un péché religieux et [avait] un impact politique, [que] ses conséquences [affectaient] même l’ordre et la paix de la société et, d’une certaine manière, la sécurité du peuple et du pays. C’est pourquoi, de ce point de vue, [la qualification du] retrait du hijab en tant qu’un haram politique [montrait] qu’il est plus important que le haram de charia . »
Dans les faits, ce que tous les membres attachés à l’autorité religieuse nomment la "sécurité du peuple et du pays" n’est qu’un faux nom pour la "sécurité et le maintien de la théocratie". L’expérience a toujours montré (et cette fois tout autant que les précédentes) que lorsque ce régime se trouve impuissant face à des soulèvements croissants, il intensifie la répression des femmes afin de contrôler une société en ébullition. La reprise des attaques chimiques contre les écolières en est un exemple caractéristique. Mais cette dictature religieuse joue avec le feu. Avec la répression, et d’autant plus lorsqu’elle est violente, il existe toujours deux options : soit elle permet d’atteindre les objectifs fixés, soit elle ne fonctionne pas. Et quand il s’agit de la seule arme disponible dans l’arsenal de réponses à donner au peuple, chaque nouvelle émeute demande une élévation du degré de répression, afin de maintenir un niveau de peur, voire de terreur, conséquent. Cela peut durer des années, mais il arrive irrémédiablement un moment où la terreur n’a plus de prise sur les gens.
Or, les manifestants ont déjà démontré avec force qu’ils ne craignaient plus le régime autoritaire des mollahs. Les attaques contre des écolières innocentes sont donc susceptibles de déclencher une nouvelle vague de protestations à l’échelle nationale, qui pourrait ébranler encore un peu plus le régime dans ses fondements.
Mercredi dernier, l’école primaire Hazrat-é Mahdi de la ville de Piranshahr, dans le nord-ouest de l’Iran, a été la cible d’une attaque au gaz chimique perpétrée par des agents du régime. De nombreuses élèves ont été transportées à l’hôpital pour y recevoir un traitement médical. D’autres rapports indiquent qu’une autre école de filles à Sanandaj, la capitale provinciale du Kurdistan, dans l’ouest de l’Iran, a également été la cible d’une attaque au gaz chimique. Plusieurs élèves ont été empoisonnées.
Dans sa volonté de faire régner la paix sociale telle qu’il l’entend, le régime tend le bâton pour se faire battre. Il cherche à convaincre l’opinion que ces mesures ne sont prises que dans le cadre du respect des lois de la charia. Mais il est évident pour tout le monde que le hijab obligatoire et l’intensification de l’oppression des femmes sous ce prétexte pendant le mois de Ramadan n’a rien à voir avec l’Islam.
Maryam Radjavi, présidente élue du Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI) l’affirme haut et fort : « Il faut y résister. Tout ce qui va à l’encontre de la liberté et du libre choix de l’Homme n’a aucune validité ».
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