C’est l’histoire abracadabrante d’un immeuble de Vaise situé au 15 de l’ avenue Sidoine Appolinaire.
C’est une histoire qui nous indique clairement comment des organismes collectifs font vraiment n’importe quoi dans leur gestion en se pliant à la logique capitaliste.
Cet immeuble a été construit dans les années 1960 par la Caisse d’ Allocations Familiales de l’arrondissement de Lyon (CAFAL) en vue de loger treize familles très nombreuses qui avaient des difficultés à trouver des appartements adéquats. En rez-de-chaussée, il y avait même un local d’ activités ouvert au quartier, l’annexe du centre social de Vaise.
Tout en demeurant propriétaire, la CAFAL avait demandé la gestion de la partie locative à l’OPAC du Grand Lyon. Cet immeuble coulait des jours paisibles riches en histoires du fait de la cohabitation de 13 familles avec beaucoup d’enfants. Tout le monde se plaisait à Vaise au sein de ce quartier populaire. A Sidoine, la solidarité n’était pas un vain mot.
Jusqu’au jour où, il y a cinq ans environ, la CAFAL a décidé de vendre cet immeuble qu’elle avait fait construire. Et oui. En effet, pour se payer un nouveau siège à la Part-Dieu, la CAFAL a dû faire les fonds de tiroirs et elle a, entre autres, pris la décision de vendre l’immeuble de Sidoine. Il faut quand même le faire ! Une caisse d’allocations familiales va jusqu’à faire expulser des familles nombreuses qu’elle a elle-même installées pour se payer des bureaux flambants neufs. A Lyon, c’est pourtant la réalité.
L’objectif principal d’une caisse d’allocations familiales n’est-il pas de soutenir les familles ? Cette décision aberrante n’a pas fait tiquer la plupart des membres de son conseil d’administration. Il faut savoir que le conseil d’administration de la CAFAL est composé de 8 représentants des employeurs, 8 des syndicats CGT, CFDT, FO et CFTC, 4 de l’UDAF, association familiale style « catho de droite », 4 personnes nommées par le préfet et 3 personnes sans droit de vote qui représentent le personnel.
Une personne représentant la CFDT a cependant mis la puce à l’oreille des élus du 9e arrondissement. Le 1er adjoint de l’époque, Lucien Durand et l’ adjoint au logement, Bernard Bochard, ont proposé alors à l’OPAC du Grand Lyon de se porter acquéreur, et ils ont tout fait pour essayer de
rapprocher les positions entre la CAFAL et l’OPAC pour que l’acquisition puisse se faire dans les meilleures conditions possibles, tout en laissant les familles locataires chez elles. Il n’y aurait eu, si cela se faisait, qu’un changement de propriétaire sans désagrément pour les familles logées.
Nonobstant, la CAFAL n’en a eu cure, s’est obstinée à demander impérativement aux familles de partir et a vendu cet immeuble à un marchand de bien de Mulhouse, qui semblerait faire partie de la famille de Chevènement. Cela s’est passé, pendant l’été, et apparemment la mairie n’y a pas prêté attention pour préempter.
Pour des familles nombreuses, il n’est pas facile de se reloger et il restait quelques familles dans l’immeuble, qui était le leur, à ce moment-là. Que n’a-t-il pas fait ce promoteur véreux pour les déloger ? Il est allé un jour lui-même jusqu’à venir faire des dégats dans l’immeuble, il est allé jusqu’à saccager lui-même la chaufferie. Il a fallu l’aide d’Habitat et Humanisme pour permettre le relogement de ces familles, car elles ne pouvaient rester à Sidoine sans eau chaude et sans chauffage.
Et puis cet immeuble est resté vide. Au bout de quelques années, ce marchand de bien de Mulhouse a voulu le revendre. Cette fois-ci la COURLY a prévenu la mairie du 9e arrondissement. Il l’a su et il est venu lui-même menacer l’adjoint à la mairie car il avait la trouille que ce soit préempté. Mais comme la mairie a dit que de toute façon elle préempterait, le promoteur villeurbannais qui voulait racheter s’est retiré de la vente.
En fin de compte, il y a en gros 18 mois de cela, c’est la COURLY qui a préempté, pour le compte de l’OPAC du Rhône, cet immeuble de logements sociaux. Bien sûr, cela a coûté plus cher à la collectivité que si l’ acquisition avait été faite tout de suite, même si la mairie a réussi à faire baisser le montant demandé de 30 %.
Comme cet immeuble est resté vide longtemps et que le bruit courait que les locataires avaient été vidés de façon pas très claire, il a été squaté par d’autres familles qui ont obtenu, en février 2003, en référé d’y demeurer neuf mois supplémentaires, malgré le manque de chauffage. Aujourd’hui il est vide.
Voilà l’histoire saugrenue d’un immeuble à Lyon, dont on a vidé les familles inutilement sur ordre de la caisse d’allocations familiales et dont il va falloir faire désormais des travaux considérables pour le réhabiliter.
Just Pothin
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