Des salariés du Groupement économique et solidaire (GES) Reliance ont, hier à Sainte-Tulle (Alpes de Haute-Provence), observé une journée de grève pour dénoncer « une longue histoire de souffrance au travail ». Plus connue sous la dénomination de « Porte Accueil », cette association intervient dans les champs de l’hébergement social et de l’insertion par l’activité économique (collecte, valorisation, réparation, recyclage d’encombrants, mobilier, électroménager...).
Début 2015, personnel encadrant en poste et anciens salariés créent le collectif Reliance pour se faire entendre cet état de mal-être. En vain, disent les grévistes qui mettent en cause la méthode de management, qui parlent de « climat de peur », de « souffrance psychique », générant un turn-over important : « Cinq psychologues en quelques années » - des arrêts en longue maladie, des états dépressifs. Moniteur éducateur entré en 2004, Patrick Robert se voit comme « le dernier survivant de l’époque ». En arrêt maladie pour épuisement professionnel durant cinq mois et demi, il a repris le boulot pour retomber dans le même état neuf mois plus tard. Chacun relève les conséquences de cette tension sur le public accueilli en activité d’insertion.
Yvette Teste, présidente du GES, et Rémy Charpy, administrateur, se sont rendus sur les lieux de la protestation. Ils n’accordent que peu de crédit à ce mouvement, ni au collectif, qui seraient, selon eux, le fait d’une petite poignée de meneurs visant à déstabiliser la structure. Ils le font remarquer : les salariés sont peu nombreux à manifester ouvertement leur mécontentement. Quelques-uns pourtant ont eu le courage de venir livrer des témoignages dont on a du mal à croire qu’ils participent d’une entreprise de déstabilisation "machiavélique". La présidente et l’administrateur veulent d’une souffrance qui serait peut-être, supposent-ils, la conséquence de problèmes inhérents à la vie privée.
« Le conseil d’administration renouvelle toute sa confiance au directeur », dit Rémy Charpy, qui explique une situation qui s’est compliquée il y a deux ans « suite au licenciement pour harcèlement d’une directrice adjointe. Des salariés ont demandé à partir. Il faut du temps pour retrouver du personnel dans ce métier, difficile à assumer, reconstruire une nouvelle équipe. Un plan d’action a été lancé qui doit se mettre en place durant cette année 2016. »
Mettre des mots sur la face cachée de la souffrance
Ancienne salariée, Natacha Vinatier vient au contact de l’administrateur pour lui faire part de son vécu. Arrivée en 2010, cette jeune femme est repartie trois ans et demi plus tard sur rupture conventionnelle, et en état de burn-out, pourtant affectée à une mission qui la passionnait. Elle le relate avec calme et une remontée palpable d’angoisse. Son interpellation sur les pressions subies a des accents de sincérité difficilement contestables. « Il fallait saisir le tribunal des Prud’hommes », rétorque Rémy Charpy. L’ex-salariée tente alors de mettre des mots sur la face cachée de la souffrance psychique, sur ces ressorts cassés qui ne permettent plus de voir demain, encore moins de se lancer dans une procédure judiciaire. Les représentants de la CGT venus soutenir les grévistes ont prévu de revenir jeudi matin à l’entrée de « Porte accueil », pendant qu’un salarié mis à pied sera en entretien avec la direction générale.
Nadia Ventre
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