Parution de la brochure ex-masculus - réflexions critiques sur les groupes d’hommes pro-féministes

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Brochures

Parue en 2013 aux États-Unis, ex-masculus est une compilation de voix s’exprimant sur le thème du « travail des hommes pro-féministes », sur ce que c’est, pourquoi nous en avons besoin et comment s’y prendre. Les textes de cette brochure proviennent d’une myriade de personnes incluant des queer, des trans, des femmes et des hommes. Nous espérons qu’elle servira de tremplin, de support à l’échange d’idées, de points de vue, d’analyses critiques, de réussites et d’échecs, et enfin qu’elle servira de ressource pour s’engager sur différents fronts afin de déconstruire et de remettre en cause le patriarcat dans le monde et dans nos vies.

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Salut, ça y est !

On a fini de traduire et mettre en page ex-masculus après une petite année de boulot ; 68 pages en linéaire, 34 pages en version brochure à propos du travail que peuvent-doivent fournir les hommes qui souhaitent sincèrement remettre en cause leur socialisation sexiste et s’engager dans la lutte contre le patriarcat.

Ex-masculus traite de la nécessité que les hommes se responsabilisent, se prennent en charge les uns les autres et s’engagent à rompre avec les comportements patriarcaux et les violences qu’ils induisent, notamment à travers la mise en place de « groupes d’hommes ».

C’est un recueil de textes rédigés par des meufs, des personnes queers, trans, non-binaires et des mecs qui ont participé à ou gravité autour de tels groupes de travail. Ces textes apportent une réflexion critique sur le travail antisexiste en général et la mise en place de tels groupes, pourquoi ils peuvent s’avérer utiles, quels limites ils connaissent et vers quels écueils ils peuvent tomber.

C’est une brochure qui est parue aux États-Unis en 2013 et qui était jusque là disponible en anglais sur la bibliothèque antipatriarcale https://remuernotremerde.poivron.org/

Si j’me suis pas trompé les versions brochures et page par page sont en pièces jointes.

Bonne lecture

Un bout d’intro :

Si tu es un homme, une personne socialisée en tant qu’homme, que tu bénéficies de privilèges masculins innés, nous avons cruellement besoin que tu te confrontes de façon critique à ta socialisation et cela avec d’autres hommes, que vous partagiez vos expériences et que vous écoutiez les femmes, les personnes trans et queer afin de comprendre comment se vivent différentes identités intersectionnelles1 et que vous luttiez contre le poids de cette réalité délirante et mortelle.

Nous proposons cette brochure en espérant qu’elle suscite cette motivation et qu’elle nous rappelle qu’il n’y a pas d’excuse pour attendre, pour mettre de côté ce volet essentiel de la lutte en faveur de causes « plus pertinentes ». Nous avons le devoir (particulièrement en tant qu’hommes) de nous responsabiliser les un·es les autres dans nos processus de déconstruction et dans nos luttes pour la libération collective. En permanence. Et cela est effrayant et difficile et nous avons simultanément besoin de guérir, de construire des relations de soutien et de soin, de grandir et de lutter ensemble.

[...]

En tant que rédacteur·ices, nous espérons également que cette publication soit la première d’une série de « guides pratiques » abordant les subtilités et la diversité des points de vue pour démolir le patriarcat. Nous l’imaginons comme une contribution à la quantité potentiellement illimitée d’écrits qui explorent les stratégies et les fronts de lutte sur lesquels nous nous engageons pour mettre fin au règne de l’hétéropatriarcat, et à la violence sexuelle et sexiste.

Extrait 1 :

Le simple fait d’être né homme dans un monde patriarcal, c’est détenir un excédent de pouvoir en régime patriarcal. Te voir juste en tant que toi-même, plutôt que comme appartenant à un groupe social genré et dominant les autres genres que le tien, c’est un privilège du patriarcat. Savoir que ton corps sera représenté et respecté dans le monde social, c’est un privilège du patriarcat.

Ne pas avoir besoin de savoir ou de t’inquiéter de comment les autres corps genrés sont traités par le système médical, c’est un privilège du patriarcat. N’avoir que rarement à craindre d’être violé ou à prendre position contre le viol est un privilège du patriarcat.

Accepter comme allant de soi que des ressources et des privilèges supplémentaires soient accordés au sexe masculin, c’est un privilège du patriarcat. Recevoir du respect même lorsqu’on ne le mérite pas, c’est un privilège du patriarcat.

Parler haut et fort, être fier, sûr de soi, prendre de la place et s’attendre à être traité avec valeur, être indépendant, dire ce que l’on pense, ne pas se laisser faire lorsqu’on est attaqué, faire n’importe laquelle de ces choses en tant qu’homme c’est être vu comme résolu, charismatique, ambitieux, dynamique, fort, viril, autrement dit disposer des privilèges du patriarcat.

Tu n’as peut-être pas choisi de recevoir ces privilèges du système patriarcal. Tu as simplement été assigné homme et donc tu t’y identifies et te présente comme tel. Mais dans une société où « homme » est synonyme de pouvoir, de domination, de « sexe fort », tu ne peux pas juste rester les bras croisés.

Extrait 2 :

J’ai passé beaucoup de temps à réfléchir à ce que je dois faire en tant que personne socialisée homme s’étant engagée à soutenir les objectifs féministes. Je n’ai pas autant réfléchi au pourquoi.
Je parle pas tant de la question de « Pourquoi lutter pour la libération collective et la fin du patriarcat ? » mais plutôt de « Pourquoi moi ? Pourquoi est-ce que je m’identifie en tant qu’individu comme un allié masculin ? »

J’aimerais donc poser la question, autant à moi-même qu’aux lecteurs de ces mots : « Pourquoi faisons-nous cela ? Quelle est notre motivation ? »

Pour être de meilleures personnes ? Pour être des partenaires intimes attentionnés et responsables ? Pour apaiser la honte et la culpabilité ? Pour couvrir de manière plus convaincante nos erreurs passées et détourner l’attention de nos défauts ? Pour créer des structures pour une prise en charge significative ? Pour répondre à une demande de quelqu’un·e que nous avons blessé ? Pour créer ou renforcer une communauté ? Pour participer à développer des mouvements pour la justice qui soient vraiment durables ? Pour cultiver l’image radicale parfaite ? Pour s’intégrer ? Pour être remarqués ? Pour contribuer, par tous les moyens dont nous disposons à résister à la violence et la déshumanisation ? Pour faire preuve de solidarité envers les femmes et les personnes trans et queer ? Pour faire croire aux gens que nous sommes différents et safe ?

Peut-être que les motivations dans le paragraphe ci-dessus devraient être une checklist2. Coche celles qui s’appliquent à toi. Si je devais le faire, en réfléchissant sincèrement et en étant au clair avec la façon dont je me suis engagé dans la lutte féministe depuis l’âge d’environ 18 ans, je cocherais probablement chaque ligne, certaines avec de grandes marques en gras, faites avec une conviction profonde, et d’autres avec réticence, peut-être au crayon pour que je puisse les effacer si je crains de partager la liste avec quelqu’un·e d’autre.

Et toi ? Tu cocherais lesquelles ? Réponds honnêtement.

Extrait 3 :

Dans une sphère particulière de ma vie (parmi tant d’autre), composée en grande partie de « punks » influencé·es principalement par l’anarcha-féminisme, majoritairement blanc.hes, queer-friendly et nomades, j’écoute et parle beaucoup avec des personnes assignées ou identifiées de sexe masculin des manières différentes dont chacun·e d’entre nous est affecté·e par la violence sexuelle et sexiste, ou même en est conscient·e. J’encourage ce genre de conversations entre mes ami·es de manière informelle et continue.

J’organise également des espaces et des rencontres pour animer des discussions dans ce milieu, sur les façons dont nous (en tant que colons pour la plupart) avons été acculturé·es pour recréer et tolérer des dynamiques colonialistes et racistes ; et les questions d’intersectionnalité entre ces divers axes d’oppressions sont parfois discutées dans des groupes en non-mixité de genre. Dans ces cadres là, il est plus confortable pour ceux socialisés hommes d’être intimement en contact les uns avec les autres pour aborder la tension (et la relation) entre, d’un côté, avoir du pouvoir et des privilèges qui oppriment les autres, et de l’autre, reconnaître qu’ils ont besoin de guérir.

En raison de mon implication en tant qu’organisatrice et facilitatrice de ces espaces et expériences partagées, beaucoup de gens qui ont été socialisés en tant qu’hommes me parlent de leur cheminement pour comprendre comment le patriarcat les a privés de certains apports dans leur vies. Quand j’écoute les hommes cis en particulier, parler de la façon dont il leur est difficile d’accéder à un paysage émotionnel complexe ou de tisser des relations intimes riches et variées, et que le vocabulaire qu’ils utilisent pour exprimer ce manque est aussi pauvre que les pistes menant à une solution, j’ai de la compassion parce que je comprends qu’ils ont hérité de ça par le biais du même endoctrinement patriarcal qui craaaaint pour nous tou·tes.

Je vois bien comment ces signes avant-coureurs d’une dissociation totale d’eux-mêmes et des autres entravent leur capacité d’empathie, et c’est pour cette raison que je suis particulièrement intéressée à ce que cela change radicalement ; parce que je sais que se couper de ses capacités à éprouver de l’empathie, c’est ouvrir la voie aux violences domestiques et sexuelles.

Lorsque les hommes cis commencent à comprendre d’où viennent ces aspects d’eux-mêmes qui ont été formés à maintenir les normes patriarcales, ils commencent souvent à imaginer à quoi ils ressembleraient s’ils étaient libérés de cette construction, et cette image comprend généralement un monde qui est à la fois plus chaleureux et à même de les accepter dans leur intégrité tout en étant beaucoup beaucoup plus sûr et agréable pour nous autres.

Mais au milieu de toutes les belles transformations et réalisations dont j’ai été témoin et qui m’ont été partagées, il y a un phénomène que je ne supporte en aucun cas. C’est lorsque les processus de remise en question des hommes cis se dirigent vers un moyen de s’apitoyer sur leur sort, de s’auto-victimiser et de se plaindre de leur impuissance. J’ai vu ça dans des situations à la fois dangereuses et offensantes, mais jamais inoffensives. Et je pense que tolérer cette façon de se percevoir est une des multiples causes du fléau de la violence sexiste au sein des communautés radicales.

La brochure en livret :
PDF - 2 Mo


La brochure page par page :

PDF - 2.1 Mo

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