Le mariage et l’adoption pour tou.te.s, c’est bien...Mais à quel prix ?
Pour la 18e année à Lyon, une marche des fiertés est organisée. Anniversaire historique des émeutes de Stonewall à New-York dans la nuit du 29 juin 1969, c’est un jour de lutte et de mémoire pour les travailleur.se.s du sexe et pour les LGBTTIQ (Lesbiennes, Gays, Bisexuel.le.s, Transexuel.le.s, Transgenres, Intersexuel.le.s et Queer) qui revendiquent la liberté et l’égalité.
Cette année, le mariage et l’adoption pour les couples lesbiens et gays ont été votés par le parlement, adoptés par le Sénat. Pour nous, le mariage n’est pas une allégeance à la normalisation, nous ne souhaitons pas reproduire un ordre hétéro-social (ex : rapport de domination économique d’un.e partenaire sur l’autre) ou pérenniser les inégalités liées à la politique familialiste (plus favorable aux individu.e.s ayant plus de ressources), mais plutôt que les droits propres de chaque individu.e soit respectés quel que soit son choix de vie. Ceci est bien une étape dans une longue marche vers plus d’égalité et vers l’abolition du patriarcat, mais ça n’est pas une fin en soi. Nous avons soutenu la démarche qui visait à acter une égalité en droit, mais nous continuons à lutter pour l’égalité, toutes sexualités confondues.
Pour cette 18 édition, le mot d’ordre officiel de la Lesbian and Gay Pride est « PMA pour toutes, luttons contre le sexisme et la lesbophobie ». Cela nous permet de soulever des questions sur la double oppression vécue par les lesbiennes (qu’elles soient déclarées mâles ou femelles à la naissance) et de nous donner une visibilité qui nous manque souvent. En tant que Pink Bloc, nous soutenons ce mot d’ordre, mais nous souhaitons approfondir notre lutte et nos revendications.
La légalisation du mariage et de l’adoption pour les couples de même sexe, plus de 30 ans après la décriminalisation de l’homosexualité en France, représente une avancée en termes d’égalité de traitement entre homosexuel.le.s et hétérosexuel.le.s. Mais qu’en est-il de la PMA, autorisée pour les couples hétérosexuels (mais ni pour les lesbiennes en couple, ni pour les femmes et/ou lesbiennes célibataires) et annoncée par Mme Belkacem le 31 mai 2012 ? Qu’en est-il de la PMA pour les
personnes transidentaires ? Le choix de ne pas faire celui de l’égalité entre tous les couples, de contraindre les couples de lesbiennes à aller à l’étranger, de ne pas accorder la PMA indépendamment de l’institution du mariage, indépendamment du processus de transition entamé et de la mention de "sexe" sur les papiers, est inacceptable pour nous. Qu’en est-il des droits des trans ? Nous réclamons l’arrêt des stérilisations forcées et l’abandon des expertises humiliantes et coûteuses pour pouvoir accéder au changement d’état civil, l’arrêt de l’injonction au divorce pour le changement d’état civil. Qu’en est-il de la notion d’identité de genre dans le droit français ? Qu’en est-il des bisexuel.le.s, toujours oublié.e.s ?
Les promesses gouvernementales, exprimées dans un but électoraliste, ont très rapidement été oubliées sous prétexte de « calmer les tensions ». Nous sommes dans un contexte qui nous empêche de considérer simplement cette loi comme une victoire : depuis plus de 6 mois, le gouvernement a sciemment laissé traîner le débat autour du mariage et de l’adoption pour tou.te.s, largement relayé par les médias complaisants. Ceci a permis de réveiller, de visibiliser et de légitimer les idée réactionnaires latentes, rassemblant des catholiques et autres croyants intégristes, mais aussi des fascistes, des militants UMP et des personnes de tous bords politiques chez qui le débat a réveillé des tendances conservatrices. Ainsi, les agressions, physiques et verbales, à l’encontre des personnes LGBTTIQ se sont multipliées. Pire, les homophobes et transphobes considèrent qu’ils ont une légitimité pour s’attaquer aux LGBTTIQ puisqu’ « ils assassinent des enfants ».
C’est pourquoi nous avons choisi de refléter l’image de la violence subie par les LGBTTIQ en nous maquillant pour symboliser la violence des coups, pour ne pas oublier, et ainsi dénoncer cette violence. Nous ne sommes pas "des victimes" ; nous sommes en action, nous participons à l’évolution de la société, et aujourd’hui nous condamnons des actes haineux intolérables. En visibilisant cette violence, nous dénonçons aussi l’attitude du Parti Socialiste qui a instrumentalisé le débat autour du
mariage et de l’adoption pour tou.te.s afin de cacher des réformes antisociales (ANI, préparation d’une nouvelle réforme des retraites et du système de Sécurité Sociale, nouvelle LRU...). Le gouvernement PS-EELV a laissé la porte ouverte à une homophobie, à une lesbophobie et à une transphobie décomplexées, réprimant les forces progressistes tout en laissant s’affirmer les forces réactionnaires.
Cela dit, nous ne pouvions pas nous attendre à une lutte véritable contre les valeurs réactionnaires de la part des dirigeants, de « gauche » ou de « droite », d’une société patriarcale, sexiste, homophobe, lesbophobe et transphobe.
L’hétéro-normativité (qui fixe les règles selon lesquelles un couple ne peut être qu’hétérosexuel) et le patriarcat sont intériorisés « grâce » à un processus de socialisation dès l’enfance, socialisation très influencée par l’école, et donc par le gouvernement qui entretient ces schémas réactionnaires. De fait, une simple loi (d’autant plus sur le mariage, institution garante des valeurs familiaristes qui impliquent une inégalité avec les autres formes de famille et les différent.e.s individu.e.s) ne peut résoudre les problèmes d’oppression dont souffrent les minorités LGBTTIQ et les femmes.
Encore aujourd’hui, nous appelons à continuer de combattre les schémas préétablis selon lesquels l’hétérosexualité serait la seule sexualité acceptable, le genre serait attribué à la naissance en fonction du sexe biologique, une femme serait le complément de l’homme et devrait lui être soumise, etc... Ainsi, nous pourrons développer de nouveaux fondements aux conceptions des sexualités et des identités de genre. De fait, il est nécessaire de lutter et de nous organiser pour partager des savoirs et mettre en place une éducation populaire. Nous ne devons rien attendre de l’Etat qui est le gardien de la
société patriarcale. Face aux violences sexistes, lesbophobes, homophobes et transphobes, nous devons nous unir pour riposter et abattre le patriarcat. La forte opposition conservatrice contre nous ne saura pas nous détruire, mais transformons cette énergie pour nous renforcer. Ne soyons pas ennemi.e.s, mais solidaires !
Nous luttons pour que les droits des lesbiennes soient les mêmes que ceux des hétérosexuelles.
Nous luttons pour déconstruire des normes intolérantes et réactionnaires.
Levons-nous ensembles contre la lesbophobie, la transphobie et l’homophobie, contre le sexisme et le patriarcat !
Queer-Trans-Pédés-Gouines
Fièr.e.s, en colère, et pas prêt.e.s à se taire !
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